Category Archives: Europe

Unis contre le pillage

Sous l’acronyme en forme de palindrome HAPPAH, est à découvrir l’association française « Halte au pillage du patrimoine archéologique et historique » qui rassemble des archéologues professionnels et amateurs déterminés à agir en particulier contre le développement de l’archéologie clandestine et l’utilisation hors la loi de détecteurs de métaux. On estime en France à au moins 40’000 le nombre de personnes s’adonnant à la détection à l’aide de ce genre d’instruments. L’association HAPPAH se donne comme mission première de mettre un frein à la « chasse au trésor », terme plus juste que celui de « détection de loisir ». Les prospecteurs bénévoles munis d’autorisations ne sont bien sûr pas visé par l’HAPPAH qui salue du reste leurs travaux essentiels pour l’étude et la sauvegarde du patrimoine archéologique.

Détection interdite! (image: O. Lemercier)

En Suisse il existe également depuis quelques années l’AGP, acronyme pour « Arbeitsgemeinschaft Prospektion » ou « Groupe de travail prospection » qui, organisé en association, regroupe les personnes physiques et les institutions actives dans le domaine de la prospection archéologique comme l’indique ses statuts. Par prospection il faut entendre aussi bien le sondage archéologique que les prospections pédestres, aériennes ou électromagnétiques. Bien que l’utilisation des détecteurs à métaux ne constitue pas une méthode de prospection privilégiée par l’association, cette manière de prospecter est parfaitement admise pour autant qu’elle se fasse avec l’autorisation des archéologues cantonaux et dans le but d’augmenter nos connaissances des gisements étudiés. En définitive, grâce aux efforts d’informations fournis par ces deux associations sur leurs territoires, il faut souhaiter à l’avenir plus d’épisodes du style « vase de Mathay » que d’affaires du genre « disque de Nebra ».

L’Europe contre le créationnisme

Le créationnisme n’est pas une science, et de ce fait doit être exclu de l’enseignement public. Tel est en substance la résolution adoptée le 4 octobre 2007 à Strasbourg par l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et qu’elle entend faire adopter par ses 47 états membres. Le vote montre cependant que les parlementaires européens sont loin d’être unanimes pour percevoir « les dangers du créationnisme dans l’éducation » et soutenir cette résolution dans le but de la faire appliquer. Car sur 76 votants, on compte 48 voix pour, 25 contre et 3 abstentions. Les trois parlementaires suisses présents, à savoir John Dupraz, Andreas Gross et Walter Schmied se trouvent unanimement du côté des partisans, de même que les cinq français, mais un belge sur trois est contre, de même que trois polonais sur quatre.

Création

“Faisons l’homme à notre image”

Voici en tout état de cause une résolution que la communauté scientifique et le corps enseignant ne peuvent qu’approuver. Elle anticipe l’arrivée sur le continent européen des thèses de mouvements religieux fondamentalistes chrétiens ou musulmans qui cherchent à mettre sur le même plan de la connaissance l’évolutionnisme et le créationnisme. Au Etats-Unis ils ont déjà réussi à imposer une telle équivalence dans le programme scolaire de plusieurs Etats de l’Union. C’est sous le couvert du concept de l’intelligent design (ID) ou « dessein intelligent » que les partisans les plus subtils du créationnisme avancent dans leur œuvre de destruction de nos connaissances scientifiques. Mais ils peuvent bien essayer ! Ils ne me feront jamais croire qu’une entité supérieure a créé en six jours l’univers, la terre et l’homme en 4026 avant J.-C.

Skara Brae menacé par les flots

Le site de Skara Brae est sans aucun doute le complexe d’habitat néolithique le plus connu des îles britanniques. Son remarquable état de conservation du à l’usage important de la pierre dans ses structures permet de se représenter fort bien ce que pouvait être une maisonnée quelque 3000 ans avant notre ère sur les Orcades au Nord de l’Ecosse. Ce gisement remarquable, si rien n’est fait pour le préserver risque cependant de disparaître en raison de la montée inéluctable de l’océan conséquence du réchauffement climatique. Autrefois situé à plus de 1500 mètres du rivage, mise au jour en 1850 à la suite d’une grosse tempête, les embruns des vagues atteignent aujourd’hui les murs de roc gris de ce site classé au patrimoine mondial.

Skara Brae

Skara Brae face à la mer

Pour Skara Brae, le gouvernement britannique est prêt à investir des moyens pour empêcher la destruction du site en édifiant un grand brise lame pour stopper l’érosion de la côte. Mais en même temps, comme le révèle une estimation menée par l’organisation Scottish Coastal Archaeology and the Problem of Erosion (SCAPE) ce sont plus 10000 sites archéologiques en bordure de mer qui sont directement menacés de destructions en raison du même phénomène. Une course contre la montre est engagée pour découvrir et étudier le plus grand nombre possible de gisements avant leur disparition dans les flots. Une observation systématique des côtes entreprise par des volontaires et un concours de photographies organisé par le SCAPE a permis une prospection a grande échelle des sites menacés. Mais les moyens alloués pour les opérations de sauvetages à prévoir seront sans doute bien insuffisants compte tenu de l’ampleur de la tâche à accomplir.

Le bois, dans tous ses états!

En 2007, comme chaque année depuis 1984 en France, 1994 en Suisse, durant un week-end du mois de septembre, ont lieu les journées européennes du patrimoine. Bien qu’européennes sous l’initiative du Conseil de l’Europe, ces journées ne se déroulent pas forcément à la même date partout. Ainsi, pour la Suisse et la Belgique, cela se passera le samedi 8 et le dimanche 9 septembre. Les français, en revanche, attendront les 15 et 16 septembre. De même, les sujets varient d’un pays à l’autre. Pour la France le thème sera celui des métiers du patrimoine, thème que la Suisse a déjà utilisé en 2002. En Belgique, ces journées seront dévolues au patrimoine militaire. Quant à la Suisse, c’est le bois, dans tous ses états, qui sera à l’honneur cette année.

Enigma La Tène

Extrait de l’affiche « Enigma La Tène »

En ce qui concerne les manifestations organisées par des archéologues lors de ces journées, ils mettront en premier lieu en avant la technique de datation basées sur la mesure des cernes de croissances du bois, autrement dit la dendrochronologie. En divers lieux de la Confédération, comme au laboratoire romand de dendrochronologie à Moudon, au Laténium à Hauterive, à Delémont ou encore à Sutz-Lattrigen et à Zürich des dendrochronologues ou des archéologues expliqueront les bases de la méthode. Au milieu du riche programme rassemblé sur le site internet de l’organisation NIKE à l’attention du grand public, à relever une performance «landart» de l’artiste Ulrich Studer, intitulée « Enigma La Tène », prévue samedi soir, 8 septembre, sur le site éponyme du second Âge du Fer, situé près de Marin dans le canton de Neuchâtel. Mais sans aller jusque là , où que vous soyez, il se passera surement quelque chose près de chez vous. Bon week-end à tous.

Promenons-nous dans les bois

Les forêts et l’humanité partagent un long passé commun. Contrairement à l’idée reçue, les surfaces boisées sont loin d’être naturelles car elles sont gérées par l’homme depuis que ce dernier s’est aventuré dans ses futaies une hache à la main. Les vastes aires que la sylve recouvre, abritent des vestiges du passé tels que fours à poix, fours à chaux, bas fourneaux d’extraction du minerai de fer, tumuli, fossés, villas romaines, mottes féodales, fortifications, et j’en passe, soit autant de structures anthropiques décelables par ceux qui fréquentent régulièrement les zones boisées. Bien que les racines puissent apporter une certaine perturbation aux structures enfouies, la couverture forestière offre généralement une protection plus grande aux vestiges que les zones agricoles, pour ne pas parler des zones à bâtir. Mais la sylviculture est de plus en plus mécanisée et pour les besoins de l’exploitation forestière il faut créer à l’intérieur des massifs des voies de dessertes ou de débardage et des aires d’engagements d’engins mécaniques, travaux qui constituent une nouvelle menace.

Roches de Châtoillon

Vestiges d’un rempart en forêt

Consciente de cela, l’Office National des Forêts (ONF) en France, a pris le parti de former les forestiers à reconnaître les traces du passé. Des collaborations entre les Directions régionales des affaires culturelles (DRAC), les Services régionaux d’archéologie (SRA) et les Directions régionales de l’ONF ont été établies pour favoriser les contacts et la mise en commun des informations en vue de la sauvegarde du patrimoine forestier et culturel. Sur le site de l’ONF on trouve de nombreuses informations relatives aux relations à établir entre forêts et archéologie, de même qu’un dossier riche de nombreux exemples. Ainsi, apprend-t-on, par exemple, que des forestiers lorrains ont débusqués une cinquantaine de villas gallo-romaines en une quinzaine d’années dans les forêts de leur secteur. L’ensemble du programme mis en place vise à sensibiliser les forestiers aux buts et aux méthodes des archéologues. Ainsi informés, les professionnels des forêts éviteront de détruire, par inadvertance ou ignorance, des vestiges précieux pour la connaissance de notre passé tout en y ajoutant leurs propres contributions.

Des Suisses en Grèce

Il y a trois semaines le ministre grec de la culture, Georgios Voulgarakis, a signé à Berne un accord bilatéral avec son homologue suisse, Pascal Couchepin, pour régler l’importation et le retour de biens culturels entre les deux pays. Mais avant cela, à Athènes, le 15 février de cette année, le ministre grec avait remis aux représentants de l’Ecole suisse d’archéologie en Grèce (ESAG) un diplôme de son gouvernement en récompense des activités de cette institution dans le pays depuis 43 ans. A cette occasion le travail des archéologues suisses a été souligné comme un exemple de collaboration culturelle et scientifique.

Erétrie

Détail d’une mosaïque du site d’Erétrie (photo ESAG)

Faisant suite à une mission archéologique commencée en 1964, l’Ecole suisse d’archéologie en Grèce a été créée en 1975 et s’est vue confiée la fouille du site d’Erétrie. Pour faire mieux connaître son activité elle vient d’ouvrir, en anglais, un nouveau site internet. On y trouve un résumé très complet de l’histoire de la cité, de la préhistoire au siècle passé, ainsi que quelques descriptions des différents chantiers ouverts à Erétrie comme celle de la maison aux mosaïques ou du théâtre (en allemand), de même que la liste complète des publications qui en résultent. A relever également que l’ensemble des rapports annuels de l’ESAG depuis 1964 est téléchargeable au format pdf. Enfin, pour les étudiants intéressés à participer aux travaux en cours ils y trouveront toutes les informations utiles de même qu’un formulaire d’inscription pour devenir des Suisses en Grèce.

Hellènes et Helvètes s’accordent

Près de deux ans après l’entrée en vigueur en Suisse de la Loi sur le transfert des biens culturels (LTBC), la Confédération, par l’entremise de Pascal Couchepin, chef du département fédéral de l’intérieur, a signé, aujourd’hui 15 mai, un accord bilatéral avec la Grèce sur le retour et l’importation de biens culturels avec le ministre grec de la Culture, Giorgos Voulgarakis. Des accords de même nature ont été signés avec l’Italie et le Pérou à la fin de l’année dernière.

Parthénon de BÂle

Moulages des frises du Parthéon à Bâle

La Loi sur le transfert des biens culturels représente l’application par la Suisse de la Convention de L’Unesco de 1970 concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels. N’ayant pas eu une approche impérialiste de la Culture, la Suisse ne dispose pas dans ses collections publiques de grands monuments de l’antiquité grecque en demande de restitution comme on en trouve à Paris, Londres ou Berlin. Si la Skulpturhalle de Bâle permet certes d’apprécier la puissance artistique des frises du Parthénon, la présentation ne constitue au demeurant qu’une copie en plâtre des fragments d’origine. A défaut de voir la Grande-Bretagne restituer les frises originales enlevées par Lord Elgin en 1801, la Grèce devrait s’inspirer de la présentation bâloise pour offrir quelque chose à voir du Parthénon aux futurs visiteurs du nouveau Musée de l’Acropole à Athènes. Initialement prévu pour être ouvert à l’occasion des derniers jeux olympiques en 2004, puis ce printemps, le nouveau musée, conçu par l’architecte franco-suisse Bernard Tschumi, ne devrait être inauguré que l’année prochaine, selon l’invitation pour 2008, que vient de transmettre le ministre grec de la culture à son homologue suisse.

Néfertiti reste à Berlin

Le buste polychrome de Néfertiti n’est pas prêt de rentrer en Egypte. Pour des raisons officielles de conservation, le ministre allemand de la culture, Bernd Neumann, refuse d’accéder à la demande du grand patron des antiquités égyptiennes, Zahi Hawass, de prêter pour trois mois, le temps d’une exposition, le célèbre buste en plâtre de l’épouse du non moins célèbre pharaon de la XVIIIe dynastie, Akhenaton. Cette oeuvre en plâtre de 48 cm de hauteur, a été découverte à Tell el-Amarna en 1912 par l’archéologue allemand Ludwig Borchardt dans les fouilles de l’atelier de l’artiste Thoutmès. Acquise légalement, semble-t-il, par l’Allemagne en 1913, elle constitue l’une des pièces maîtresses de la Museumsinsel de Berlin.

Néfertiti à Berlin

Le buste de Néfertiti exposé dans son nouvel écrin

On peut penser que Berlin craint, en cas d’acceptation, de ne pas pouvoir récupérer le portrait de la reine une fois l’exposition terminée, car Le Caire a maintes fois exprimé le désir du retour définitif du buste de la souveraine dans son pays, ainsi que celle de la pierre de Rosette, actuellement au British Museum, ou celui du plafond zodiacal du temple de Dendérah, au Louvre. En guise de rétorsion, l’Egypte menace, toujours par la voix de Zahi Hawass, de ne plus permettre dorénavant le prêt de pièces archéologiques égyptiennes à l’Allemagne, si la présente demande n’est pas satisfaite. Mais la menace n’effraye pas les milieux culturels allemands qui peuvent se passer des emprunts au patrimoine égyptien pour présenter des expositions intéressantes.

Le vase de Mathay

Le village de Mathay, situé dans le département du Doubs en France, était connu jusqu’à présent, archéologiquement parlant, comme un faubourg de la ville romaine de Mandeure près de Montbéliard. Dorénavant elle sera également célèbre pour le trésor remarquable contenu dans un vase mis au jour lors d’une campagne de recherche effectuée sur le territoire de cette commune par trois prospecteurs affiliés à la Fédération nationale des utilisateurs de détecteurs de métaux (FNUDEM). Mais avant le trésor, ce qu’il y a surtout de remarquable dans cette découverte c’est qu’elle a été faite par des utilisateurs de détecteur à métaux qui ont immédiatement fait part de leur importante découverte aux autorités communales et archéologiques compétentes comme l’exige le nouveau code du patrimoine français. Le trésor, proprement dit, est constitué par un ensemble de plus de 1400 pièces de parures féminines de l’âge du Bronze final. La découverte telle que relatée dans Le Monde du 10 avril annonce la mise au jour de « plusieurs colliers faits de perles de verre, d’ambre et de feuilles d’or enroulées ; une série de bracelets différents en bronze ; une ceinture articulée constituée de maillons de bronze dotés de pendeloques ; des anneaux de cheville en bronze; des plaques de 10 cm de long recouvertes d’une feuille d’or, qui devaient être cousues sur un costume, et enfin une quantité étonnante de petits anneaux de bronze enfilés en série. Le dépôt contient aussi plusieurs sphères en tôle de bronze de quatre centimètres de diamètre revêtues d’une feuille d’or ». Grâce à cette découverte en ensemble clos et à l’assemblage des différents types représentés, on peut dater l’enfouissement des vestiges aux alentours de l’an 1000 avant J.-C.

Trésor de Mathay

Une partie du contenu du vase de Mathay (photo J.-F. Piningre)

Les conversations sur le forum des prospecteurs, nous apprennent qu’ils se félicitent d’avoir déclaré le trésor et de ce que, dans cette affaire, tout se soit bien passé avec la direction du Service régional d’archéologie de Franche-Comté. En outre on y découvre des photos du trésor lors de sa découverte et après l’extraction du vase dans un plâtre. La FNUDEM se targue d’avoir déjà déclaré une dizaine de trésor, plus de 2500 sites archéologiques inédits et des milliers d’artéfacts et de monnaies, dont certaines inédites. Grâce à l’exemple d’amateurs honnêtes comme Eric Rovert, l’inventeur du vase de Mathay, la collaboration entre les archéologues et les prospecteurs ne peut que s’en trouver renforcée.

L’archéologie en questions

Quels sont les lois et les concepts de base de l’archéologie préventive ? C’est pour répondre à cette interrogation fondamentale que le ministère français de la Culture vient de publier un guide de l’archéologie préventive et de la protection du patrimoine intitulé fort justement : l’archéologie en questions. Ce petit aide-mémoire, constitué de 40 questions et de leurs réponses, est avant tout destiné aux services des collectivités locales chargés de mettre en œuvre les règlementations en vigueur en France.

Fouilles à Nice

Intervention archéologique dans une rue de Nice

Pour les archéologues et les spécialistes engagés dans le domaine de l’archéologie, cette plaquette constitue un bon résumé de l’ensemble de leurs activités. Même si ce guide est destiné à l’usage de la France, ce n’est pas sans intérêt que l’on peut le consulter sur d’autres territoires, afin de se livrer à des comparaisons utiles des pratiques. En tous les cas, un tel vade-mecum devrait exister partout, car il serait bien, où que l’on se trouve, de rappeler les droits et les devoirs des uns et des autres, en particulier avant tous projets de construction nécessitant des fouilles, en cas de découverte fortuite de vestiges ou pour régler l’usage des détecteurs de métaux.