Moi, au cœur du temps

La première phrase d’introduction à ma thèse commençait ainsi : « Plonger au cœur du temps, faire revivre le passé, tel est le souhait de l’archéologue». En écrivant ces mots je rêvais consciemment de disposer d’un tunnel du temps comme celui popularisé par la série « Au cœur du temps » pour vérifier sur le terrain toutes les hypothèses et conjectures que j’allais devoir présenter. Fouiller et sortir du sol des objets abandonnés, perdus ou rejetés par des personnes depuis longtemps disparues, m’apporte toujours une sensation très forte d’immersion dans le temps, d’autant plus que je me trouve dans l’espace qu’ils ont eux-mêmes fréquenté. Mais contrairement aux dimensions spatiales, l’axe du temps est à sens unique, et il nous sera sans doute à jamais impossible de revenir en arrière, dans la quatrième dimension.

Exposition « Le temps et moi» et série « Au cœur du temps », en affiches

C’est à une réflexion sur la subjectivité du temps que nous propose la nouvelle exposition du musée romain de Lausanne-Vidy : « Le temps et moi». Alors que le monde entier a été contraint à une pause forcée en raison du coronavirus, les concepteurs nous invitent avec intelligence à nous plonger dans le tunnel du temps et à en explorer différentes facettes. D’abord, le temps des physiciens, des géologues et des astronomes qui en forme la trame générale depuis l’explosion du Big Bang, il y a 13,8 milliards d’années, puis la création du système solaire et de la Terre, il y a 4,6 milliards d’années, puis l’évolution de la vie sur notre planète, depuis 3,5 milliards d’années, qui a produit notre espèce, Homo Sapiens, dernière représentante des différentes espèces d’hominidés qui ont peuplé notre monde depuis 7 millions d’années. Et comme on n’arrête pas le progrès, on réalise que les objets du quotidien de notre vingtième siècle peuvent déjà apparaitre étranges aux yeux de la génération du troisième millénaire. A chacun de se plonger dans son propre passé pour y extirper des souvenirs enfouis dans les tiroirs de sa mémoire, ou sur les images pieusement conservées dans ses albums de photographies. Face à ces rapides changements, la philosophie d’Épicure, que résume la formule « Carpe Diem » semble encore plus d’actualité que du temps d’Horace, et nous permet d’envisager avec sérénité la fin de notre fugace existence. En définitive, visiter cette exposition ouverte jusqu’au 18 avril 2021, ce n’est pas tuer le temps, mais prendre du bon temps.


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