Monthly Archives: July 2008

Un musée pour Gaza

L’année dernière était présenté au Musée d’Art et d’Histoire de Genève la remarquable exposition : Gaza à la croisée des civilisations. Le but de cette présentation, conçue dans le cadre d’un projet placé sous le patronage de l’Unesco, était de montrer la richesse du passé de ce territoire à travers la collection exceptionnelle d’objets collectés par Jawdat Khoudary. Cette exposition devait servir d’amorce à la création d’un véritable musée archéologique palestinien dans la bande de Gaza. Hélas, la politique et le conflit qui ensanglante la région se montrent peu propices à une telle aventure. La bande de Gaza est toujours bouclée par l’armée israélienne, et le président de l’autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, qui avait inauguré l’exposition de Genève en compagnie de Micheline Calmy-Rey, présidente de la Confédération, a dû quitter la zone, si bien que le projet, tel que développé alors, n’a pu être poursuivit.

Al-Mathaf, Gaza

La grande salle du Musée de Gaza (photo: New-York Times)

Le projet de musée se trouve ainsi au point mort. Cela était sans compter la passion, toujours intacte, que nourrit Jawdat Khoudary pour l’histoire de sa patrie. En tant qu’entrepreneur en bâtiment il était bien placé pour récolter les objets mis au jours fortuitement par les machines de chantier de son entreprise de construction et, alors que chez nous les machinistes se font généralement un devoir de ne rien voir et de ne surtout rien dire en cas de découvertes pouvant intéresser notre passé, à Gaza ce sont justement les ouvriers des chantiers qui ont permis, en l’espace de 22 ans, à Jawdat Khoudary, de réunir l’essentiel de sa collection. Ces jours, après six mois de travail, il entreprend les dernières finitions à son musée, baptisé tout simplement Al-Mathaf (le musée en arabe). Un restaurant et un hôtel sont prêts également à accueillir les futurs visiteurs. Encore faut-il leur permettre de venir.

Un sosie romain d’Elvis

La maison de vente aux enchères Bonhams, fondée en1793, est l’une des plus anciennes et, à la suite d’achats et de fusions, est devenue, si ce n’est la plus grande, l’une des plus grandes sociétés dans son domaine. Elle dispose de deux salles de vente à Londres, de sept autres en Angleterre et des enchères sont également conduites aux Etats-Unis, en France, à Monaco, en Australie, à Hong-Kong, à Dubaï et en Suisse. Elle possède un réseau de bureaux et de représentants régionaux dans 25 pays à travers le monde et offre des conseils et des services d’expertises spécialisées dans 57 domaines. Le 15 octobre de cette année, cette société procédera à Londres à la vente de 150 objets issus de la collection Graham Geddes, l’un des plus grands collectionneurs d’art australien, pour un montant estimé à 1 million de livres sterlings.

Sosie romain d'Elvis
Un Elvis romain.

Si les plus importantes pièces mises en vente seront des vases grecs et des statues romaines, il en est une qui retiendra plus particulièrement l’attention puisqu’il s’agit d’un élément d’acrotère d’angle de sarcophage baptisé « Elvis ». Ce surnom, donné par le collectionneur lui-même, s’impose immédiatement lorsque l’on observe la pièce de profil. Les fans du King du Rock’n Roll n’ont en effet aucun mal à reconnaitre dans ces traits un sosie de leur idole décédée en 1977. Pourtant ce portrait romain, découvert en Egypte, est daté du 2ème siècle après J.-C. C’est donc Elvis qui lui ressemble et pas le contraire, preuve que si l’histoire peut se répéter, il en est de même de la figure humaine.

Conflit autour d’un temple classé

Si on dit que la musique adoucit les mœurs, il ne semble pas en être de même, d’une façon générale, de la culture, surtout lorsque des intérêts nationalistes sont en jeu. Ainsi en est-il du temple hindou de Preah Vihear situé sur la ligne de crête de la chaîne des Dangrek sur sol cambodgien, mais dont l’accès est plus facile à partir du territoire thaïlandais. De fait, en raison de cette situation particulière, les touristes doivent s’acquitter d’un droit de visite à la fois auprès des administrations thaïlandaise et cambodgienne. Depuis quelques jours la tension est montée entre les deux pays voisins tant et si bien qu’aujourd’hui des centaines d’hommes, se font faces de part et d’autres de la frontière et que des craintes sérieuses pour la paix sont formulées.

Preah Vihear
Entrée du sanctuaire de Preah Vihear (image CISARK)

Ce temple vient pourtant d’être accepté le 7 juillet, parmi 26 autres sites, dans la liste du patrimoine mondial de l’Unesco, lors de la 32ème session de son Comité qui s’est tenue à Québec. A cette occasion, le temple de Preah Vihear a été reconnu comme un “chef d’oeuvre remarquable de l’architecture khmère”. “Il est très pur dans sa configuration comme dans la finesse de ses décors”, précise le Comité. Il a également encouragé le Cambodge et la Thaïlande à collaborer pour obtenir une nouvelle “inscription transfrontalière” de l’ensemble du site, afin que sa “valeur exceptionnelle” soit conservée. Selon les dernières nouvelles, un comité mixte, dirigé par les ministres de la Défense des deux royaumes, devrait se réunir lundi 21 juillet dans la province thaïlandaise de Srah Keo, pour trouver une issue à la crise et parvenir à un accord sur la gestion du site.

Datation d’une éclipse légendaire

Les astres ont de tout temps attiré le regard des hommes et, dès la plus haute antiquité, ces derniers ont cherché un sens dans leurs apparitions et leurs disparitions. Le disque en bronze de Nebra, daté des alentours de 1600 avant notre ère, présente ainsi le Soleil, la Lune et les Pléiades sous forme de figures en feuilles d’or. Ce sont ces corps que l’on retrouve en bonne place dans les récits anciens et les historiens savent depuis longtemps que les phénomènes célestes auxquels ils sont liés constituent une aide précieuse à leur datation. Ainsi, pendant la guerre du Péloponnèse, alors que la flotte athénienne faisait le siège de la ville de Syracuse survint une éclipse de Lune. Compte tenu des circonstances d’apparition de cette éclipse, celle-ci a pu être datée, a posteriori, du 27 août 413 avant Jésus-Christ, donnant ainsi l’opportunité de dater, selon notre calendrier, l’ensemble de la campagne militaire relatée par Thucydide.

Ithaque, plage d'Ulysse
La plage du retour d’Ulysse à Ithaque

Les textes grecs par excellence que sont l’Iliade et l’Odyssée semblent pouvoir être également datés de la sorte. Deux chercheurs, Marcelo Magnasco, de l’université Rockefeller, à New York et Constantino Baikouzis de l’Observatoire astronomique de La Plata, en Argentine, viennent de publier dans les Annales de l’Académie Américaine des Sciences une étude sur les phénomènes astronomiques décrits dans l’Odyssée en essayant de corréler ces événements avec les tables astronomiques que l’on peut facilement établir pour l’époque si l’on dispose d’un logiciel approprié. Selon l’Odyssée, le jour funeste choisit par Ulysse pour massacrer les prétendants de Pénélope, est marqué par l’apparition d’une éclipse totale du soleil. De plus, six jours avant cette tuerie, Vénus apparaît élevée dans le ciel, et vingt-neuf jours avant, l’amas des Pléiades et la constellation du Bouvier sont visibles au coucher du Soleil. Enfin, 33 jours avant, Mercure est haute à l’aube et proche de la fin ouest de sa trajectoire. Pendant le siècle pouvant correspondre au déroulement de l’Iliade et de l’Odyssée, soit entre 1250 et 1115 avant notre ère, sur les 1684 nouvelles Lunes de la période étudiée par ces chercheurs, seule la nouvelle Lune en date du 16 avril 1178 avant J.-C, doublée d’une éclipse de Soleil visible en Mer Ionienne, semble pouvoir correspondre avec les autres phénomènes célestes présents dans le récit. Ainsi, lorsque au 8ème siècle avant notre ère, sous le nom d’Homère, ces récits oraux furent transcrits, la tradition parvint à transmettre, non seulement un ensemble de lieux et de personnes, mais également le souvenir d’une séquence unique de phénomènes célestes permettant, des millénaires plus tard, de parvenir à une datation précise d’événements légendaires.

Le tourisme menace-t-il le patrimoine mondial?

Voici revenu le temps des vacances et des touristes, et deux correspondants de l’agence Associated Press ont fait ces derniers jours leur dépêche sur la menace qu’engendre l’afflux de visiteurs sur deux sites archéologiques majeurs de l’Amérique du sud : la citadelle du Machu Picchu au Pérou et les statues géantes de l’ île de Pâques au Chili. En direction du premier, ce ne sont pas moins de 800’000 personnes qui s’y sont rendus l’année dernière, alors que le second fut visité par 52’000 personnes. Si l’on en croît les dépêches, le touriste est perçu par certains archéologues comme un ennemi qui met en péril la sauvegarde à long terme de ces monuments, en raison de ses passages répétés avec ses chaussures de marches, alors que ces sites, comme le dit l’un des archéologues concernés, ont été construits pour des gens en sandales et pieds nus. Les maux dus au tourisme de masse, dont on se plaint également ailleurs, sont connus : surfréquentation, urbanisme sauvage, vandalisme, pillage; reste à trouver le remède.

Aguas Calientes
En route pour le Machu Picchu ! (photo :Flickr)

Le remède, comme cela a pu être éprouvé dans des sites comme Pompéi ou Stonehenge, l’Alhambra ou Angkor, réside dans la constitution d’un plan de gestion des sites qui permet de concilier les intérêts de tous les acteurs en présence, à savoir les populations et les autorités locales, les conservateurs du patrimoine et les milieux du tourisme. Du reste le centre du patrimoine mondial de l’Unesco, qui ouvre aujourd’hui à Québec, la 32ème session de son comité, oblige désormais tout candidat à l’inscription au patrimoine mondial de fournir avec son dossier un tel plan de gestion, sachant que si l’on veut un réel développement durable du patrimoine il faut pouvoir accorder les aspects économiques, environnementaux et sociaux des sites classés. Le touriste n’est pas un ennemi, il faut juste apprendre à le guider.