Monthly Archives: November 2008

Les mammouths et nos pères

Selon les conclusions d’un article paru dans la revue scientifique russe « Archéologie, ethnographie et anthropologie de l’Eurasie » les mammouths auraient disparu non pas en raison de leur chasse par l’homme, mais du fait de l’apparition dans les troupeaux de graves maladies osseuses dues à une carence en nourriture. « Nous avons trouvé des os de mammouths portant des traces de modifications catastrophiques – des os soudés entre eux, ou présentant des traces d’ostéoporose, d’ostéomalacie (ramollissement des os), de chondrose. Il y a des cas, j’ai pu le constater de mes propres yeux, où deux, trois, voire quatre vertèbres étaient soudées entre elles. Les mammouths ont une vingtaine de vertèbres, et la moitié d’entre elles présentaient des anomalies de ce type », a déclaré Vassili Zénine à l’agence de presse RIA Novosti.

mammouth
Squelette de mammouth de Sibérie

Si les hommes ont su profiter de l’affaiblissement de ces géants de la steppe pour en chasser quelques uns, comme le prouve quelques découvertes archéologiques ils ne seraient pas directement responsable de leur disparition comme d’aucun le pensent. Les modifications géologiques et écologiques liées à la période glacière ont provoqués la raréfaction des minéraux utiles à leur organisme. Comme l’explique Vassili Zénine, «Le mammouth était un énorme animal, qui avait besoin d’une quantité importante de minéraux. Comme tous les autres herbivores, il compensait son manque d’apport en substances minérales en absorbant différents types d’argile ». Privé de ces substances nécessaires, en raison d’un changement dans la nature des sols qui d’alcalins sont devenus acides, les mammouths auraient connus de plus en plus de problèmes de motricité et de reproduction, conduisant à l’apparition entre 24 et 17 milles ans de nombreux ossuaires de mammouths. Je suis soulagé que nos pères ne soient pas responsables de leur disparition. Cela permet à mon père de les rejoindre au cimetière, sans animosité de leur part.

Massacre chez les Cordés

Le land du Saxe-Anhalt au centre de l’Allemagne, continue à livrer de remarquables découvertes archéologiques. Après nous avoir offert il y a quelques années le disque de Nebra, ce sont quatre sépultures d’un genre particulier qui ont été mises au jour. En effet, il se confirme, après l’analyse scientifique des squelettes découverts dans les tombes du site de Eulau en 2005, qu’il s’agit bien des victimes d’un effroyable massacre perpétré au Néolithique au sein d’une même communauté villageoise de la civilisation de la Céramique cordée. L’une des tombes renfermait même les restes d’une femme, d’un homme et de leurs deux enfants âgés de cinq et de neuf ans, comme le prouve une analyse génétique. En tout, treize personnes ont été ensevelies en même temps, qui portaient toutes les stigmates d’une mort violente. Alors qu’une exposition spéciale leur est consacrée au Landesmuseum für Vorgeschichte de Halle, les résultats de leur étude viennent d’être publiés dans le numéro du 18 novembre des Annales de l’Académie Américaine des Sciences (PNAS).

Tombe à Eulau
Eulau, tombe d’un couple et de leurs enfants (photo : LDA)

L’ensemble de ces quatre tombes est daté d’environ 2600 avant J.-C., soit en pleine période de la civilisation de la Céramique cordée (Schnurkeramik-Kultur en allemand, Corded Ware Culture en anglais). Observation intéressante, elles ne renfermaient que les restes d’enfants et d’adultes de plus de trente ans, la plupart disposés par paire, une disposition peu orthodoxe pour l’époque, puisque les corps étaient généralement isolés, la tête tournée vers le sud. En revanche, aucun adolescent, ni jeune adulte, ne s’y trouvait, et l’on imagine que ce sont ces survivants qui auraient procédé aux inhumations en privilégiant les liens d’affection et de parenté entre les défunts. Par ailleurs, une analyse isotopique sur le strontium contenu dans l’émail des dents des personnes ensevelies, démontre que les femmes ont passé leur jeunesse dans une autre région que les hommes et les enfants. Cela prouverait, ce que la dissémination des céramiques cordées tendait à démontrer depuis quelques années déjà, à savoir que les mariages, à cette époque, étaient de nature exogame, c’est-à-dire que les épouses quittaient leur communauté d’origine pour suivre celle de leur époux. Ceci constitue une grande découverte pour reconstituer l’organisation sociale des sociétés passées.

Axoum et la Reine de Saba

Le 4 septembre 2008, une grande cérémonie a rassemblé un nombreux publics à Axoum, dans la province du Tigré, en Ethiopie, venus là pour accueillir le retour du second plus grand obélisque de ce site, classé au patrimoine mondial de l’Unesco en 1980. Ce monument, de 24 mètres de haut et pesant 152 tonnes, a été découvert couché en trois pièces séparées et emporté en 1937 par les troupes de Benito Mussolini, pour être exposé à Rome. Les accords d’armistice de 1947 prévoyaient le retour de cet objet. Mais ce n’est qu’en avril 2005 que le premier bloc de granit a été rapatrié et le dernier a été mis en place cet été. Cette stèle gravée, vieille de 1700 ans, est un témoin de l’importance du royaume d’Axoum, du temps où cette ville était la capitale d’un puissant état chrétien. De plus, une légende en fait également la capitale de la reine de Saba, et le dernier domicile connu de l’Arche d’Alliance.

Les stèles d'Axoum
Les stèles d’Axoum (photo: Unesco)

A propos de cette légende et à l’occasion de la sortie de son dernier livre, Marek Halter et les éditions Robert Lafont, avec les contributions de chercheurs invités viennent d’ouvrir un blog participatif permettant aux lecteurs, aux amateurs d’archéologie et d’histoire d’apporter leurs commentaires sur le mythe de la reine de Saba. Comme le présente l’auteur, ce blog doit « raconter non seulement l’histoire de cette reine qui a fait rêver des générations mais aussi les résultats de toutes les recherches qui ont été faites autour d’elle. M’appuyant sur les dernières recherches archéologiques, j’ai tenté de dessiner les frontières du royaume de Saba, raconter la vie mouvementée de cette jeune reine, éclairer les guerres qu’elle a menées au Yémen de l’autre côté de la Mer Rouge et son alliance avec le royaume d’Israël du sage Salomon ». Voici une jolie entrée en matière, susceptible d’attiser notre curiosité envers cet ouvrage.

Ave Google Earth, internauti te salutant !

L’année dernière était présenté à la mairie de Rome le projet « Rome Reborn » qui aurait du conduire à une présentation sur place de la ville antique en 3D. Mais, malgré cette annonce officielle, rien n’a été réalisé in situ, comme j’ai pu le constater dernièrement. Entre temps, comme nous l’apprend le site internet de l’Université de Virginie en charge du projet, une version 2 de « Rome Reborn » est en préparation. Cependant, rien de ce travail n’est perdu, car les données collectées pour la version 1 viennent d’être reprises par la société Google qui, en partenariat avec la société Past Perfect Productions, les a misent en ligne pour les internautes sous la forme d’un calque intégré à Google Earth. Pour activer ce nouveau module 3D, il suffit, une fois le logiciel téléchargé et ouvert, d’ouvrir la section Infos pratiques, de chercher le sous-menu Galerie puis de sélectionner la case « La Rome antique en 3D ». On peut également s’en faire une idée grâce à une petite vidéo sur You Tube.

Forum romain dans Google Earth
Vue du Forum romain dans Google Earth

Le modèle de la Rome antique présenté ici est censé être celui de la ville sous le règne de l’empereur Constantin, soit en l’an 320 de notre ère. Mais une petite visite sur le forum nous montre qu’en face de la tribune des rostres on découvre la colonne de Phocas, qui n’a été dressée qu’en 608 ap. J.-C. Mais ne boudons pas notre plaisir. Après le téléchargement de 270 Mo de données, ce ne sont pas moins de 6700 bâtiments de l’Urbs, plus ou moins détaillés, qui s’offrent à notre contemplation avec un accent particulier mis sur onze monuments, parmi les plus célèbres, que l’on peut également parcourir de l’intérieur soit le Colisée, le Ludus Magnus, le temple de Vénus et de Rome, le temple de Vesta, le forum Julii, la Regia, la Curie, le Tabularium et les basiliques Julienne, Emilienne et de Maxence. De plus, 250 notices permettent d’en savoir plus sur les monuments. Enfin, si vous êtes un spécialiste de la topographie de la Rome antique et que vous voulez contribuer par vos connaissances à la publication du modèle numérique, Bernard Frischer, responsable du projet Rome Reborn, vous invite à prendre directement contact avec lui, pour y intégrer vos données. A terme, on devrait même pouvoir naviguer dans le temps, grâce à un curseur de type Time line, et ne faire apparaître que les monuments présents à un moment précis de l’histoire de la ville éternelle.

Chamanesse ou pas ?

Le squelette d’une femme, vieux de 12000 ans, a été découvert récemment dans la grotte d’Hilazon Tachtit, un site Natufien situé en Galilée occidentale dans le nord d’Israël par une équipe d’archéologues de l’Université hébraïque de Jérusalem. L’inhumation était accompagnée d’offrandes qualifiées d’exceptionnelles. En effet, dans la tombe fut mis au jour cinquante carapaces entières de tortue, un pelvis de léopard, l’extrémité de l’aile d’un aigle doré, la queue d’une vache, deux crânes de martres, l’avant-bras d’un sanglier ainsi qu’un pied humain. L’archéologue Leore Grosman, qui dirige la fouille, pense qu’il pourrait s’agir de la tombe d’une femme ayant pu jouer un rôle particulier dans sa société, celui de chamanesse.

Tombe natoufienne

Vue de la sépulture

Le corps de cette femme petite, handicapée et âgée de 45 ans, est enseveli dans une position inhabituelle. Il a été couché sur le côté alors que la colonne vertébrale, le bassin et le fémur droit s’appuyaient contre la courbure de la paroi sud de la tombe de forme ovale. Les jambes étaient écartées et les genoux repliés vers l’intérieur. Lors de l’enterrement, dix grosses pierres on été placées au-dessus de la tête, du bassin et des bras de l’individu. Est-ce que le riche contenu faunistique de la tombe, inhabituel pour l’époque ou la position du corps permettent de conclure que le défunt était une chamanesse? Pourquoi pas une cheffe de clan ? Je vous laisse en juger ! Les détails de cette découverte viennent d’être publiés dans les Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, ou, PNAS, du 4 novembre 2008.