Les éditions Allary viennent de publier un livre « L’homme préhistorique est aussi une femme ; Une histoire de l’invisibilité des femmes ». Le titre part d’une évidence : il y avait aussi des femmes dans la Préhistoire. Mais l’auteure de cet essai, Marylène Patou-Mathis démontre comment, pendant 150 ans, les préhistoriens et anthropologues ont minoré, ignoré et rejeté l’importance des femmes dans l’évolution de l’humanité. A côté de l’homme chasseur, artiste ou guerrier, la femme se trouvait dans les publications archéologique assujettie à des taches féminines comme la reproduction, l’éducation des enfants, la cueillette des végétaux et la préparation en cuisine de la nourriture. Pourtant, des études récentes, comme celle présentée dans ce blog, démontrent qu’il n’y a pas de déterminisme biologique dans leurs aptitudes entre les sexes. Toute personne entrainée obtient des résultats comparables quel que soit son genre. Cependant, dans la langue française, selon l’Académie, le masculin l’emporte sur le féminin, même si les sociétés humaines nous offrent différentes configurations sociales. A côté du patriarcat actuel dominant, il a existé des sociétés basées sur le matriarcat, comme l’illustre les mythiques Amazones. De même, si les arbres familiaux de notre société sont construits de manière patrilinéaire, d’autres sociétés sont matrilinéaires et transmettent leur filialisation à travers les mères.
Réunion de femmes préhistoriques au musée des Confluences de Lyon
Nous devons admettre que devant une gravure, une sculpture ou une peinture pariétale il n’y a aucun moyen de l’attribuer sans équivoque à un homme plutôt qu’à une femme. Il apparaît même que la majorité des mains négatives observées dans l’art pariétal du Paléolithique supérieur, comme dans la grotte de Gargas, seraient féminines, si on se base sur l’indice de Manning. L’exogamie qui conduit les femmes à quitter leur famille pour aller vivre dans la communauté de leur époux, a favorisé les échanges de savoirs et de savoir-faire entre les groupes. Une observation que je peux attester dans la dispersion des céramiques de la Culture cordée. Admettons aussi que la détermination du sexe à partir des ossements n’est pas toujours évidente. Ainsi le squelette de « l’Homme de Menton », daté de – 24 000 ans, connu pour son crâne recouvert de coquillages et d’ocre, s’est révélé être une femme, après une étude approfondie de sa morphologie et est dorénavant appelé « La Dame du Cavillon ». Une incertitude du même genre pèse sur la très célèbre « Lucy ». En l’absence d’analyse génétique, les paléoanthropologues doivent admettre que seul 30% des squelettes sont distinguables du point de vue de leur sexe. Mais, les dieux ont progressivement remplacé les déesses, la Grande Déesse a fait place à un Dieu mâle unique, tant et si bien que dans l’histoire de notre société le rôle des femmes a été effacé et négligé, au profit des seuls mâles. Ainsi, il faut sortir des clichés et des préjugés. La découverte d’arme(s) dans une tombe n’implique pas forcément celle d’un homme comme en témoigne des sépultures Scythes ou Vikings. Et rien ne prouve que la taille du silex fût réservée aux hommes ou que la maîtrise du feu soit une découverte masculine. En mettant en évidence tous les biais cognitifs qui donnent à un sexe le pouvoir sur l’autre, ce livre nous encourage à rechercher ensemble la meilleure voie possible vers une complémentarité totale des genres. A l’exemple de l’ethnie San d’Afrique du Sud dont l’auteure est aussi une spécialiste, en plus des populations néanderthaliennes.