Il y a près d’une année, le 22 mars 2007, au salon du livre de Paris, apparaissait le projet d’une bibliothèque numérique appelée Europeana initiée par la Bibliothèque Nationale de France (BNF), dont le but avoué était de défier Google Book sur le terrain de la mise à disposition de livres numérisés. Au début du mois dernier, le 11 février 2008, sous le même nom, a été présenté au salon du livre de Francfort un projet nettement plus ambitieux car il ne s’agit plus seulement de mettre à disposition des internautes des livres numérisés mais également des journaux, des tableaux, des photographies, des objets, des enregistrements audio et vidéo numérisés par l’ensemble des institutions européennes spécialisées dans la sauvegarde du patrimoine comme les musées, les bibliothèques, les archives et les médiathèques. Pour s’en faire une idée une démonstration et une présentation vidéo d’Europeana sont accessibles en ligne. Le but visé par ce projet étant de promouvoir l’identité culturelle de l’Europe et de diffuser son patrimoine on peut cependant s’étonner que la musique de présentation retenue soit celle de These Boots Are Made For Walkin de Nancy Sinatra, même si elle s’accorde aux souliers de Van Gogh.
Europeana, des millions de pièces à comparer
Les défis de ce portail sont nombreux. Il s’agit de rassembler sur un même site et selon un même standard des données issues d’institutions très différentes et ne partageant pas la même langue. La recherche de documents devrait se faire à l’aide d’un moteur de recherche utilisant les tags qui leur seront attribués par les institutions contributives et par les utilisateurs comme cela se fait efficacement pour les photos dans Flickr. Pour nous autres archéologues il faut espérer que nous pourrons trouver dans Europeana les outils nous permettant de partager et de comparer le contenu de nos inventaires, de nos dépôts de fouilles et de nos collections de référence. Mais pour cela il faudra bien sûr une volonté de tous les partenaires potentiels de mettre à disposition leurs données, et cela est loin d’être acquis. J’ai pour l’heure du mal à imaginer que des conservateurs de musée qui interdisent encore aujourd’hui aux visiteurs de prendre quelques clichés de leurs objets puissent mettre demain, gracieusement à disposition des internautes, des images numériques de ces mêmes objets. Pour cela il faudrait que la Commission Européenne qui soutient le projet puisse persuader ou contraindre les réfractaires à mettre leurs données sur le web. Le lancement de la version prototype d’Europeana est prévue en novembre 2008 et devrait contenir au moins deux millions de documents. J’espère être alors déçu en bien comme on dit chez nous.