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Massacre chez les Cordés

Le land du Saxe-Anhalt au centre de l’Allemagne, continue à livrer de remarquables découvertes archéologiques. Après nous avoir offert il y a quelques années le disque de Nebra, ce sont quatre sépultures d’un genre particulier qui ont été mises au jour. En effet, il se confirme, après l’analyse scientifique des squelettes découverts dans les tombes du site de Eulau en 2005, qu’il s’agit bien des victimes d’un effroyable massacre perpétré au Néolithique au sein d’une même communauté villageoise de la civilisation de la Céramique cordée. L’une des tombes renfermait même les restes d’une femme, d’un homme et de leurs deux enfants âgés de cinq et de neuf ans, comme le prouve une analyse génétique. En tout, treize personnes ont été ensevelies en même temps, qui portaient toutes les stigmates d’une mort violente. Alors qu’une exposition spéciale leur est consacrée au Landesmuseum für Vorgeschichte de Halle, les résultats de leur étude viennent d’être publiés dans le numéro du 18 novembre des Annales de l’Académie Américaine des Sciences (PNAS).

Tombe à Eulau
Eulau, tombe d’un couple et de leurs enfants (photo : LDA)

L’ensemble de ces quatre tombes est daté d’environ 2600 avant J.-C., soit en pleine période de la civilisation de la Céramique cordée (Schnurkeramik-Kultur en allemand, Corded Ware Culture en anglais). Observation intéressante, elles ne renfermaient que les restes d’enfants et d’adultes de plus de trente ans, la plupart disposés par paire, une disposition peu orthodoxe pour l’époque, puisque les corps étaient généralement isolés, la tête tournée vers le sud. En revanche, aucun adolescent, ni jeune adulte, ne s’y trouvait, et l’on imagine que ce sont ces survivants qui auraient procédé aux inhumations en privilégiant les liens d’affection et de parenté entre les défunts. Par ailleurs, une analyse isotopique sur le strontium contenu dans l’émail des dents des personnes ensevelies, démontre que les femmes ont passé leur jeunesse dans une autre région que les hommes et les enfants. Cela prouverait, ce que la dissémination des céramiques cordées tendait à démontrer depuis quelques années déjà, à savoir que les mariages, à cette époque, étaient de nature exogame, c’est-à-dire que les épouses quittaient leur communauté d’origine pour suivre celle de leur époux. Ceci constitue une grande découverte pour reconstituer l’organisation sociale des sociétés passées.

Ave Google Earth, internauti te salutant !

L’année dernière était présenté à la mairie de Rome le projet « Rome Reborn » qui aurait du conduire à une présentation sur place de la ville antique en 3D. Mais, malgré cette annonce officielle, rien n’a été réalisé in situ, comme j’ai pu le constater dernièrement. Entre temps, comme nous l’apprend le site internet de l’Université de Virginie en charge du projet, une version 2 de « Rome Reborn » est en préparation. Cependant, rien de ce travail n’est perdu, car les données collectées pour la version 1 viennent d’être reprises par la société Google qui, en partenariat avec la société Past Perfect Productions, les a misent en ligne pour les internautes sous la forme d’un calque intégré à Google Earth. Pour activer ce nouveau module 3D, il suffit, une fois le logiciel téléchargé et ouvert, d’ouvrir la section Infos pratiques, de chercher le sous-menu Galerie puis de sélectionner la case « La Rome antique en 3D ». On peut également s’en faire une idée grâce à une petite vidéo sur You Tube.

Forum romain dans Google Earth
Vue du Forum romain dans Google Earth

Le modèle de la Rome antique présenté ici est censé être celui de la ville sous le règne de l’empereur Constantin, soit en l’an 320 de notre ère. Mais une petite visite sur le forum nous montre qu’en face de la tribune des rostres on découvre la colonne de Phocas, qui n’a été dressée qu’en 608 ap. J.-C. Mais ne boudons pas notre plaisir. Après le téléchargement de 270 Mo de données, ce ne sont pas moins de 6700 bâtiments de l’Urbs, plus ou moins détaillés, qui s’offrent à notre contemplation avec un accent particulier mis sur onze monuments, parmi les plus célèbres, que l’on peut également parcourir de l’intérieur soit le Colisée, le Ludus Magnus, le temple de Vénus et de Rome, le temple de Vesta, le forum Julii, la Regia, la Curie, le Tabularium et les basiliques Julienne, Emilienne et de Maxence. De plus, 250 notices permettent d’en savoir plus sur les monuments. Enfin, si vous êtes un spécialiste de la topographie de la Rome antique et que vous voulez contribuer par vos connaissances à la publication du modèle numérique, Bernard Frischer, responsable du projet Rome Reborn, vous invite à prendre directement contact avec lui, pour y intégrer vos données. A terme, on devrait même pouvoir naviguer dans le temps, grâce à un curseur de type Time line, et ne faire apparaître que les monuments présents à un moment précis de l’histoire de la ville éternelle.

Un IG NOBEL attribué en archéologie

La distribution des prix Nobel a commencé aujourd’hui. Pour un archéologue cependant, aucune chance de s’en voir attribué un, puisque l’archéologie ne fait pas partie des disciplines nobélisées. En revanche, son travail pourrait être nominé aux Ig Nobel décernés chaque année depuis 1991 dans l’université de Harvard, à Cambridge, près de Boston dans l’état du Massachusetts, et dont le palmarès a été publié la semaine dernière. Pour la petite histoire, le nom de cette distinction est basée sur un jeu de mots et fait immédiatement allusion aux Prix Nobel puisque «Ig-Nobel » se prononce en anglais comme « ignoble ». Dix prix sont remis chaque année à des personnes dont les travaux dans n’importe quelle discipline ne peuvent pas ou ne doivent pas être reproduits, sachant que la reproductibilité d’une démarche serait un critère de sa scientificité.

Tatou chronocide
Le tatou, un animal chronocide

Cet année, pour la 18ème édition, nos confrères brésiliens Astolfo Astolfo Gomes de Mello Araújo et José Carlos Marcelino de l’université de Sao Paulo ont été récompensé pour un article publié dans la revue Geoarchaeology en avril 2003. Suivant une approche expérimentale, ils ont établi la capacité des tatous à modifier notre compréhension du passé en déplaçant dans le sol les vestiges archéologiques, démontrant ainsi les effets de la bioturbation pour la datation des artefacts basée sur la stratigraphie. Parmi leurs principales conclusions on relève qu’il n’y a pas de corrélation entre la taille, la forme et le poids des artefacts et la distance de leurs déplacements. En d’autres lieux et avec une autre faune, on aurait pu tout aussi bien arriver aux mêmes conclusions en analysant l’activité des taupes, renards et autres blaireaux, soit des animaux tout autant potentiellement chronocides. Malheureusement pour nous, mais heureusement pour la discipline, ce n’est que la seconde fois depuis la création des Ig Nobel, qu’un travail concernant notre branche se voit ainsi honoré. La nomination précédente remonte à 1992 lorsque les Eclaireurs de France se sont vus décerner un Ig Nobel en Archéologie pour avoir consciencieusement effacé des peintures rupestres magdaléniennes, dans la grotte de Mayrière, sur la commune de Bruniquel en Tarn-et-Garonne, lors d’une croisade contre les graffitis.

Jour d’équinoxe

Aujourd’hui, jour d’équinoxe. Pour tous les terriens, qu’ils résident dans l’hémisphère nord ou sud, près des pôles ou sur l’équateur, le jour et la nuit auront, cette journée, la même longueur. Ce phénomène se produit deux fois par année, à six mois d’intervalle, et marque le début d’une nouvelle saison, le printemps ou l’automne. Le passage est prévu à 15h44 TU, soit à 17h44 de notre heure. Contrairement aux solstices aucune célébration particulière ne marque l’événement. Et pour cause, car si d’un point de vue astronomique la définition du phénomène est claire, puisqu’il correspond au moment où le Soleil, dans son mouvement apparent sur l’écliptique, traverse l’équateur céleste, celui-ci est plus difficile à percevoir sur la base d’une simple observation empirique au sol. Pour arriver au concept d’équinoxe il faut déjà procéder à une observation très précise du ciel, ce qui amène à la notion plus complexe de calendrier.

Sunset on Stonehenge

Couché de soleil sur Stonehenge (Photo: Gesellschaft für Archäoastronomie)

Il existe plusieurs organisations qui se consacrent au rapprochement entre archéologie et astronomie. La plus ancienne est la Société européenne pour l’astronomie dans la culture (SEAC), qui est une association professionnelle de scientifiques oeuvrant dans les domaines de l’archéoastronomie et de l’ethnoastronomie. Le but de cette société, fondée à Strassbourg en 1992, est de promouvoir l’étude interdisciplinaire de la pratique astronomique dans son contexte culturel, un sujet d’importance, dans le cadre plus général de l’étude des sociétés humaines et de leur rapport avec leur environnement. Pour ce faire il faut réunir des compétences dans des domaines aussi divers que les sciences humaines, les sciences naturelles, les sciences sociales et autres disciplines. En Amérique du Nord, avec des motivations semblables, existe depuis 1996 l’International Society for Archaeoastronomy and Astronomy in Culture (ISAAC). La plus jeune organisation de ce type, la Gesellschaft für Archäoastronomie, a été fondée à Berlin le 14 juin 2008, dans le cadre du Musée de préhistoire de Charlottenburg,. Elle organise du 24 au 26 octobre un colloque sur le thème : « Mesure, figure et géométrie en pré et protohistoire, ou Les origines des mathématiques et de l’astronomie ». Comme on le constate, le domaine est encore jeune et l’on peut espérer, grâce aux travaux effectués par les chercheurs affiliés à ces sociétés, des avancées dans les domaines de l’histoire de l’astronomie, de la mythologie et de la cosmologie, et cela sans faire appel aux extraterrestres.

Mission à Por-Bajin

L’été c’est, pour les étudiants, le temps des longues vacances universitaires. Pour un étudiant en archéologie c’est le plus souvent également celui de la pratique de la fouille, qui lui permettra d’acquérir quelques connaissances pratiques et quelques crédits d’étude supplémentaires à faire valoir dans son cursus universitaire. Pour onze d’entre eux, provenant des universités de Lausanne, Neuchâtel, Bâle et de la HE-Arc de La Chaux-de-Fonds, l’expérience estivale se pare, en plus, d’un parfum d’aventure en République de Tuva, une république autonome au sein de la Fédération de Russie située au sud de la Sibérie et faisant frontière avec la Mongolie. Conduite par Pascal Burgunder, chargé de recherche à l’Institut d’archéologie et des Sciences de l’antiquité de l’Université de Lausanne, l’expédition à laquelle ils ont pris part vise à mieux connaître l’ancienne forteresse de Por-Bajin, bâtie et occupée par les tribus ouïgoures entre les 7ème et 8ème siècles de notre ère.
Por-Bajin
La forteresse de Por-Bajin (photo : Fondation Por-Bajin)

Le site de Por-Bajin, forme actuellement une île reliée à la rive du lac Tere-Hol par un ponton de bois. Depuis l’été 2007, il est l’objet d’un vaste programme de recherches pluridisciplinaires entrepris par la Fondation Por-Bajin avec le concours de l’Académie des sciences de la Fédération de Russie ainsi qu’avec la participation d’équipes détachées de musées, d’instituts de recherche et d’universités russes. C’est par l’entremise de la Direction pour le développement et la coopération (DDC) sur demande du ministre russe Sergueï Shoigou, en charge du Ministère des situations d’urgence de la Fédération de Russie, que ces universitaires suisses ont été conviés à cette mission. Jour après jour, à travers leur blog, l’équipe suisse compte nous faire partager le récit de leur séjour, entamé le 29 juillet et qui se poursuit jusqu’au 30 août. Par procuration, profitons de leurs aventures !

Datation d’une éclipse légendaire

Les astres ont de tout temps attiré le regard des hommes et, dès la plus haute antiquité, ces derniers ont cherché un sens dans leurs apparitions et leurs disparitions. Le disque en bronze de Nebra, daté des alentours de 1600 avant notre ère, présente ainsi le Soleil, la Lune et les Pléiades sous forme de figures en feuilles d’or. Ce sont ces corps que l’on retrouve en bonne place dans les récits anciens et les historiens savent depuis longtemps que les phénomènes célestes auxquels ils sont liés constituent une aide précieuse à leur datation. Ainsi, pendant la guerre du Péloponnèse, alors que la flotte athénienne faisait le siège de la ville de Syracuse survint une éclipse de Lune. Compte tenu des circonstances d’apparition de cette éclipse, celle-ci a pu être datée, a posteriori, du 27 août 413 avant Jésus-Christ, donnant ainsi l’opportunité de dater, selon notre calendrier, l’ensemble de la campagne militaire relatée par Thucydide.

Ithaque, plage d'Ulysse
La plage du retour d’Ulysse à Ithaque

Les textes grecs par excellence que sont l’Iliade et l’Odyssée semblent pouvoir être également datés de la sorte. Deux chercheurs, Marcelo Magnasco, de l’université Rockefeller, à New York et Constantino Baikouzis de l’Observatoire astronomique de La Plata, en Argentine, viennent de publier dans les Annales de l’Académie Américaine des Sciences une étude sur les phénomènes astronomiques décrits dans l’Odyssée en essayant de corréler ces événements avec les tables astronomiques que l’on peut facilement établir pour l’époque si l’on dispose d’un logiciel approprié. Selon l’Odyssée, le jour funeste choisit par Ulysse pour massacrer les prétendants de Pénélope, est marqué par l’apparition d’une éclipse totale du soleil. De plus, six jours avant cette tuerie, Vénus apparaît élevée dans le ciel, et vingt-neuf jours avant, l’amas des Pléiades et la constellation du Bouvier sont visibles au coucher du Soleil. Enfin, 33 jours avant, Mercure est haute à l’aube et proche de la fin ouest de sa trajectoire. Pendant le siècle pouvant correspondre au déroulement de l’Iliade et de l’Odyssée, soit entre 1250 et 1115 avant notre ère, sur les 1684 nouvelles Lunes de la période étudiée par ces chercheurs, seule la nouvelle Lune en date du 16 avril 1178 avant J.-C, doublée d’une éclipse de Soleil visible en Mer Ionienne, semble pouvoir correspondre avec les autres phénomènes célestes présents dans le récit. Ainsi, lorsque au 8ème siècle avant notre ère, sous le nom d’Homère, ces récits oraux furent transcrits, la tradition parvint à transmettre, non seulement un ensemble de lieux et de personnes, mais également le souvenir d’une séquence unique de phénomènes célestes permettant, des millénaires plus tard, de parvenir à une datation précise d’événements légendaires.

Des archéologues à la NASA

La National Air and Space Administration, mieux connues sous l’acronyme NASA a été fondée le 1er octobre 1958 et célèbre donc cette année ses cinquante ans. Parmi les milliers de scientifiques qui travaillent dans la prestigieuse agence spatiale étasunienne se trouve un archéologue, Tom Sever. C’est à travers son intérêt pour la détection à distance (remote sensing) qu’il fut engagé dès 1982 à la NASA. Les premières utilisations archéologiques des techniques de détection à distance furent mises en œuvre sur le site Anazasi de Chaco Canyon au Nouveau-Mexique. Elles révélèrent les traces d’un important réseau d’anciennes pistes – plus de 300 km de cheminement détectés – celles de nombreuses constructions et les zones d’implantation des champs. En 1987, à l’occasion de la construction d’un barrage sur la rivière Usumacinta entre le Guatemala et le Mexique, l’utilisation d’images satellites permis également la découverte de plusieurs sites Mayas avant qu’ils ne soient détruits. Depuis lors la télédétection a été employée avec succès en de nombreux points du globe.

Tikal

Les ruines de Tikal vues par le satellite IKONOS (Photo: NASA)

L’analyse des observations effectuées par les satellites gravitant autour de la Terre a permis récemment à Tom Sever et à ses deux collègues Dan Irwin et William Saturno de découvrir que les arbres qui recouvrent les sites mayas ont une couleur légèrement différente de la canopée environnante en raison de la présence dans le sol des argiles utilisées dans les constructions disparues. La représentante de l’administrateur de la NASA, Shana Dale, s’est rendue sur place en décembre dernier, comme en témoigne son blog, pour se rendre compte de l’aide que les observations de l’agence spatiale étasunienne peuvent apporter à l’archéologie et à la connaissance du passé du monde maya. Ce qui semble avant tout justifier l’engagement d’archéologues à la NASA c’est d’utiliser leurs informations pour comprendre des situations contemporaines. Ainsi la déforestation importante effectuée dans les années 800 de notre ère en Amérique centrale aurait contribué à assécher le monde Maya ce qui a conduit à la disparition de cette civilisation. Aujourd’hui la déforestation est en œuvre dans de nombreuses régions du globe et on parle de l’apparition de nouvelles sécheresses. Est-ce que l’histoire se répète ? Que pouvons-nous apprendre du passé pour ne pas commettre les mêmes erreurs aujourd’hui et demain ? C’est à répondre à ces questions que peut aussi servir l’archéologie et pas seulement à recueillir des pots cassés.

Stonehenge sous la loupe

Les recherches archéologiques s’intensifient autour du cromlech de Stonehenge, situé dans le sud-est de l’Angleterre, lieu emblématique de l’archéologie britannique, classé en 1986 dans la liste des objets du patrimoine mondial de L’Unesco. Depuis plusieurs années, dans le cadre du Stonehenge Riverside Project , six universités collaborent pour mener une enquête approfondie sur le pourquoi, le quand et le comment de son édification. L’université de Shefield a ainsi mené plusieurs campagnes dans les environs du monument, à Durrington Walls, en relation avec la construction d’une autoroute. Depuis la semaine dernière et jusqu’au 11 avril, Timothy Darwill, de l’Université de Bournemouth et Geoffrey Wainwright, président de la Société des antiquaires, se sont donnés deux semaines pour interroger le monument lui-même. Sous les regards des nombreux visiteurs du site et avec l’accord de l’organisation English Heritage, ils ont ouvert une fosse de 3,5 sur 2,5 mètres pour lever une partie du voile de mystère dont continue à se parer le vénérable monument.
Stonehenge
Stonehenge, emblème de la Préhistoire (photo: Flickr)

Les dernières fouilles en ce lieu remontent à 1964, mais ce seront les premières à utiliser les acquis de l’archéologie scientifique. Selon une des nombreuses hypothèses attachées au monument, Stonehenge aurait été un temple dédié à la guérison, « une sorte de Lourdes préhistorique » d’après Timothy Darwill.  Son équipe recherche en particulier des fragments de dolérite provenant des collines galloises de Preseli, situées à 250 kilomètres de là, restes des 80 menhirs qui formaient le double cercle de pierres bleues érigé vers 2600 av. J.-C et disparu quelques 200 ans plus tard, remplacés par 30 mégalithes en grès. En raison de leur couleur particulière, une tradition populaire prête à ces pierres des vertus thérapeutiques. Avant de disparaître elles auraient pu être débitées pour en faire des talismans, d’où la récolte des fragments. La connaissance des mégalithes avance, comme on le constate, par petits bouts.

Bonnes nouvelles de Zhoukoudian

Alors que l’opinion internationale a les yeux braqués sur le sort que le gouvernement chinois réserve au Tibet et à sa population autochtone, deux groupes d’architectes chinois, l’un de l’Institut de design du Liaoning, l’autre provenant de l’Université Qinghua, ont chacun de leur côté proposé la construction d’une grande tente pour abriter l’une des grottes de Zhoukoudian. Ce lieu, comme celui de la Grande Muraille, fait partie des sites archéologiques majeurs aux alentours de la capitale de la Chine qui se prépare, comme chacun le sait, à accueillir les prochains Jeux Olympiques. Ces projets de mise en valeur architecturale du site, comme d’autres tentatives précédentes, devront au préalable être acceptés par les archéologues et approuvés par l’administration d’état du patrimoine culturel qui s’est déjà opposés à d’autres tentatives de réalisations précédentes.

Souvenirs de Zhoukoudian
Carte postale de Zhoukoudian (photo : Flickr)

Cet ensemble de grottes, situé à une cinquantaine de kilomètres au sud ouest de la ville de Pékin (Beijing), était connu dans la pharmacopée chinoise pour renfermer des os de dragon. En fait de dragon il s’agissait parfois de vestiges de Sinanthrope. C’est là en particulier que l’on découvrit en 1929 la calotte crânienne d’un Homo erectus, que l’on baptisa l’Homme de Pékin. Par la suite, d’autres restes d’Homo erectus pekinensis ou Sinanthropes, au moins une quarantaine d’individus, y furent mis au jour. En 1937, les Japonais envahirent la Chine et, en 1941, dans l’urgence de l’avancée des troupes nipponnes, les scientifiques cherchèrent à mettre la collection d’ossements à l’abri aux Etats-Unis. Malheureusement, le chargement n’arriva jamais à destination et fut, soit bombardé sur terre ferme, soit coulé en mer.  La violence est aveugle et n’épargne ni les Sinantropes, ni les Tibétains. Par la suite, le site a été inscrit en 1987 sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco et un musée dédié à l’Homme de Pékin a été édifié à Zhoukoudian. Il y a peu, de nouvelles recherches y sont conduites qui devraient amener à la découverte de nouveaux fossiles pour compléter les pertes dues à la guerre. On espère ainsi de bonnes nouvelles de Zhoukoudian, et pourquoi pas, du Tibet.

ADS: des données archéologiques par millions

Au mois de février de cette année l’Archaeological Data Service (ADS) a eu le plaisir d’annoncer la conclusion d’un accord pour le maintien des subventions qui lui sont versées par l’Arts and Humanities Research Concil (AHRC). Ceci permettra à l’ADS de poursuivre sa tâche essentielle, celle de la préservation de toutes les données archéologiques du Royaume-Unis en accord avec la mission qui lui a été assignée en 1995 par l’Arts and Humanities Data Service (AHDS) dans le domaine de l’archéologie. Cet accord est le fruit de négociations entamées l’année dernières entre l’AHRC et l’AHDS. Pour défendre le niveau des subventions menacées par de sérieuses coupes budgétaires les utilisateurs des données collectées en étaient même venus à lancer une pétition de soutien en ligne.

Hache de l'âge du Bronze et fibules romaines

Planche d’objets provenant de la Société des Antiquaires de Londres

L’ADS, qui est hébergé par l’Université de York, assure la collecte, la conservation et la diffusion des résultats de fouilles effectuées au Royaume-Uni ou par des archéologues britanniques ailleurs dans le monde. Et lorsque l’on jette un coup d’œil, en cliquant sur les bases rassemblées et mises en ligne par l’ADS, on ne peut que rester ébahi et pantois devant les quantités de données conservées dans l’un ou l’autre de ses dépôts. Ainsi la base ArchSearch contient des informations sur plus d’un million d’entrées de type sites, monuments ou fouilles situés en Grande-Bretagne. D’autres bases permettent d’avoir accès à des thèses, des rapports de fouilles, des articles, des bibliographies, des revues, des cartes et des archives. Pour diffuser ses informations, l’ADS a choisi des formats standardisés, pour partager des images, des textes, des cartes ou des géodonnées entre archéologues-internautes. Et toute cette impressionnante documentation est en accès libre, sans inscription, sous réserves de l’acceptation des règles habituelles sur le copyright. Lorsque je vois ça, je me dis que nos collègues britanniques ont bien de la chance de disposer d’un tel outil pour entamer ou poursuivre leurs recherches.