Category Archives: Découverte

Les premiers Lacustres de Suisse, où sont-ils?

Le service archéologique du canton de Berne a mis a profit la préparation des journées internationales du patrimoine pour tenir une conférence de presse le 7 septembre et annoncé la découverte dans les eaux de Sutz-Lattrigen du « plan d’habitation le plus ancien de Suisse entièrement documenté et daté de façon certaine». Il s’agit d’une construction lacustre d’assez grande dimension (13,6 x 4,3 m) située à 200 m de la rive et datée à l’année près par la dendrochronologie à l’an 3863 av. J.-C. En relation avec cette construction isolée, se trouve trois étranges structures circulaires de 4 à 8 mètres de diamètre qui ont été interprétées comme des nasses à poisson à l’instar de celles utilisés autrefois en mer Baltique. L’ensemble constitue sans doute une pêcherie.

Sutz-Lattrigen Solermatt

Restitution de la pêcherie (montage: Max Stöckli)
En écho à cette intéressante découverte réalisée par l’équipe de plongeurs du service archéologique du canton de Berne, dirigée par Albert Hafner, me reviennent d’autres annonces de mises au jour se voulant à chaque fois les plus anciennes dans cette catégorie que toutes les autres. Ainsi nos collègues du canton de Fribourg ont présenté il y a quelques années l’habitat de Montilier-Fischergässli comme le plus ancien habitat lacustre de Suisse puisque leur série de dates dendrochronologiques commençait en 3895 av. J.-C, soit quelques décennies avant les premières dates de Sutz-Lattrigen. Mais à ce petit jeu là, ce sont encore les archéologues du canton de Vaud qui sont les actuels vainqueurs car le plus ancien village construit à Concise-sous-Colachoz serait daté de 4350 av. J.-C. Alors, qui dit mieux pour recevoir le titre de premier Lacustre suisse?

Archéologie forensique au Pérou

Dans le cimetière inca de Puruchuco, au nord-est de Lima, des milliers de momies y ont été découvertes depuis 1999. Mais à partir de 2004, les archéologue péruvien Guillermo Cock et Elena Goycochea ont annoncé avoir mis au jour 72 squelettes, enterrés en hâte à faible profondeur sans les usages traditionnels qui faisaient reposer la tête vers l’est, dont 35 montrent des signes de mort violente. Parmi ces ossements, un crâne de jeune homme présente un trou circulaire qui, analysé à l’institut de forensique de l’université de New-Haven dans le Connecticut aux Etats-Unis, a montré des traces évidentes de fer. L’impact pourrait avoir été causé par une balle de mousquet, une arme à feu utilisée par les Espagnols lors de la Conquête de l’Empire Inca. Des céramiques issues du même site permettent de dater l’origine des ossements aux alentours des années 1530. La victime serait ainsi parmi les plus anciennes personnes tuées par balle du continent américain.

Puruchuco

Une victime inca tuée par balle (photo:E. Goycochea)

Tous ces autochtones, semblent avoir été les victimes d’une confrontation avec les conquistadors, peut-être lors du siège de Lima par les troupes de Francisco Pizarre durant l’été 1536. Mais si certains corps présentent également des marques de coups donnés par des armes à feu ou tranchantes européennes, d’autres montrent des traces de blessures d’armes indigènes comme des haches de pierre et des flèches. « Cela confirme le soutien de troupes indigènes aux conquistadors », un élément qui était souvent passé sous silence par les chroniques de l’époque, relève Guillermo Cock. Pour plus de détails et des images un petit documentaire sur le sujet est accessible sur YouTube.

La Dame de Vix et sa demeure

Sur le plateau supérieur du Mont Lassois, en Côte-d’Or, en Bourgogne, des prospections géophysiques, menées par des étudiants et professeurs de la Hochschule für Technik de Stuttgart, avaient révélé, entre 2004 et 2006, les contours d’une ville à plan orthonormé au centre duquel se trouve un grand bâtiment. Depuis lors, une équipe d’archéologues français, allemands et autrichiens s’est attelée au dégagement de cette agglomération datée de la fin du Premier âge du fer, soit des 6e et 5e siècles avant notre ère. Rappelons que c’est au pied de cette colline que fut découverte, en 1953, une tombe recouverte d’un grand tumulus de 42 m de diamètre dans laquelle fut trouvée, entre autres, un grand cratère en bronze de 1,63 m de hauteur et la dépouille funéraire, richement parée, d’une femme trentenaire, dite la Dame de Vix, du nom du village voisin du site.

Fouilles au Mont Lassois
Fouilles au Mont Lassois (Photo: Jeff Pachoud, AFP)

Lors de la campagne de fouille de cette année, qui s’est terminée le 10 août, une grande demeure de 35 mètres de long sur 21,5 mètres de large a été mise au jour. Cette construction s’appuie sur des poteaux en bois, aux murs faits de clayonnage enduits d’ocre, dont le plan général rappelle celui d’un mégaron grec, avec des murs en avancée soutenant un porche et une abside en demi-cercle. Ce modèle de bâtiment, constitué par une grande salle quadrangulaire précédée d’un vestibule, atteste de l’influence des cultures méditerranéennes, grecque et étrusque, sur la civilisation celte. Il pourrait constituer, selon l’équipe dirigée par Bruno Chaume, chercheur au CNRS, de la résidence principale de la Dame de Vix. A moins qu’il ne s’agisse, plus prosaïquement, d’un édifice à caractère religieux.

Zéro de style

En 1882, l’archéologue et historien de l’art allemand August Mau a établit dans son ouvrage « Geschichte der dekorativen Wandmalerei in Pompeji » la base de la classification de la peinture pompéienne en quatre styles, classification encore en usage de nos jours. Cependant, une équipe d’archéologues français vient de mettre en évidence, lors de la fouille d’une tannerie de Pompéi, une fresque pourvue d’un style décoratif mural plus ancien que le premier style pompéien de Mau. Il s’agit d’un décor formé d’une haute plinthe noire surmontée de filets noirs et rouges et d’une frise d’ondes marines noires sur fond blanc.

Nouveau style pompéien

Composition du nouveau style pompéien (photo: J.-P. Brun/CNRS)

C’est en cherchant à comprendre l’évolution de la tannerie par des fouilles stratigraphiques que l’équipe française, conduite par Jean-Pierre Brun, directeur de recherche au CNRS et directeur du Centre Jean Bérard à Naples et Martine Leguilloux, archéozoologue au Centre archéologique du Var, a mis au jour fortuitement une salle de banquets, datée des environs de l’an 300 av. J.-C, soit à une époque où la ville était encore sous la domination des Samnites. Compte tenu de son antériorité par rapport au premier style pompéien de Mau, le nouveau style a été rapidement surnommé « style zéro». Pourtant, si la composition picturale qui défini ce style est nouvelle dans le cadre de Pompéi, elle a déjà été reconnue dans la nécropole de la ville de Cumes, ancienne colonie de Chalcis et d’Erétrie, fondée au milieu du VIIIe siècle avant notre ère, située à une vingtaine de kilomètre au nord de Naples et soumise à Rome dès 338 avant notre ère. Comme cette composition picturale n’est pas issue de rien, elle ne mérite pas son qualificatif de «style zéro». Je mettrais en revanche un zéro de style pour les nomenclateurs qui ont proposé cette appellation.

Autres temps, autres moeurs

Demain, dans l’émission de Radio France le Salon Noir, Vincent Charpentier s’entretiendra avec l’archéologue Antoine Cottard de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) sur une découverte effectuée au mois de janvier de cette année réalisée dans l’aire de la nécropole de la cité gallo-romaine de Mediolanum Aulercorum, de nos jours Evreux dans le département de l’Eure, en France. La particularité des dernières découvertes dans cette nécropole connue depuis le 19ème siècle c’est le dépôt, dans une même fosse, de restes humains avec ceux de chevaux. Si l’association de dépouilles humaines et chevalines est attestée chez les Gaulois d’avant la conquête romaine, cela devient étrange si l’on considère le fait que, sur la base de quelques céramiques caractéristiques, ces vestiges sont datés du 3ème siècle de notre ère.

Fouilles d'Evreux

Un crâne humain entre deux mâchoires de cheval (photo: INRAP)

Sur une surface de 200 m2, ce ne sont pas moins de 126 humains, de tous sexes et de tous âges qui ont été découverts en association avec les restes de 50 chevaux entiers et de 600 parties d’animaux. Certaines mises en scène sont particulièrement surprenantes comme celle de ce crâne humain pris en étau entre deux mâchoires supérieures de cheval. Les archéologues se perdent en conjecture pour trouver une raison à ces regroupements étranges. « Autres temps, autres mœurs » comme dit le proverbe attribué à Pindare. Aujourd’hui, en ce jour pluvieux, après un rite funéraire des plus traditionnel dans l’église du village, mon père, accompagné de toute notre famille et de nos amis, a conduit ma mère pour son dernier voyage vers une plus sobre crémation. Au revoir, maman.

Uppåkra sort de l’ombre grâce à Mickey

A Uppåkra, à cinq kilomètres au sud de la ville de Lund en Suède, a été découvert en 1934 un village incendié à la fin du 10ème siècle de notre ère. Le site a été fouillé sérieusement depuis 1996, et plus de 3000 objets en bronze, en argent et en or, datés entre 55 et 1000 après J.-C. y ont été mis au jour. Mais malgré cette richesse, Uppåkra demeurait peu connu. Récemment une nouvelle découverte d’un objet métallique a soudainement attiré l’attention du monde entier sur ce gisement, avec un titre accrocheur « Mickey chez les Vikings». L’artéfact en vedette est une fibule en bronze de 3 cm de longueur, datant des environs de l’an 900 de notre ère et qui présente la particularité de ressembler singulièrement au personnage créé par Walt Disney en 1928.

Fibule d'Uppakra

Souris ou lion ?

Parmi les sites Internet colporteurs de cette information on trouve la chaîne de télévision étasunienne Discovery. Le Musée Historique de l’Université de Lund est à la recherche de généreux donateurs pour offrir aux visiteurs une exposition permanente des nombreux objets de l’Âge du Fer scandinave découverts dans la région, dont ceux en particulier d’Uppåkra. Une entreprise d’emballages a déjà offert 4,7 millions de couronnes suédoises à cette fin. Comme cette dernière découverte a été médiatisée jusqu’aux Etats-Unis, Jerry Rosenberg, l’archéologue responsable de la fouille, n’a pas hésité à faire un appel, par le canal des médias, à la firme Disney, pour leur suggérer de financer les prochaines campagnes de fouilles, même si, selon lui, cette tête, aux grandes oreilles caractéristiques, n’est pas celle d’une souris, mais d’un lion.

Hatchepsout, où es-tu?

Une importante conférence de presse est annoncée demain en Egypte. A 11h00 locale, le ministre de la culture Farouk Housni et le secrétaire général du conseil suprême des antiquités Zahi Hawass dévoileront au monde la momie identifiée comme celle de la reine Hatchepsout. Pour résumer, elle fut la fille de Thoutmosis I et la cinquième reine de la 18ème dynastie, avant de prendre le titre de pharaon, entre 1479 et 1458 avant notre ère. C’est à ce titre qu’elle fit construire le temple de Deir El-Bahari, devenu tristement célèbre en 1997 lorsque 57 touristes, dont une majorité de Suisses, furent tués lors d’un attentat terroriste. Coïncidence voulue, cette conférence fait écho à un documentaire qui sera diffusé le 15 juillet prochain sur la chaîne de télévision Discovery.

Hatchepsout

La momie favorite

Après une enquête minutieuse de plus d’une année, il semble qu’un examen attentif a enfin permis d’identifier la momie royale d’Hatchepsout. Parmi les prétendantes possibles, deux momies découvertes dans la tombe n°60 de la vallée des rois (KV60). La candidate favorite, est couchée dans un sarcophage attribué à Sitre-In, nom de la nourrice de la pharaonne, selon un article consacré à cette recherche publié sur le site internet de Zahi Hawass. Sa concurrente, quant à elle se trouvait simplement sur le sol de la tombe, mais serait, selon d’autres égyptologues, la momie profanée de la vraie souveraine. Hatchepsout où es-tu ? Dans un sarcophage ou jetée au sol? La réponse, tombera sans doute demain!

Parure de mollusques

Une équipe de recherche archéologique internationale, composée de chercheurs marocains de l’Institut National des Sciences et du Patrimoine (INSAP), anglais de l’Université d’Oxford, français du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), allemands du Römisch-Germanisches Zentralmuseum (RGZM) et australiens de l’Australian National University (ANU) vient d’annoncer la découverte dans la grotte des Pigeons, près de Taforalt dans la région de Berkane au Maroc, des plus anciens éléments de parure connus à ce jour, puisqu’ils dateraient d’au moins 82’000 ans avant notre ère. Ces éléments de parure consistent en des coquilles de mollusque perforées en leur centre, de l’espèce Nassarius gibbosulus, dont une douzaine d’exemplaires a été mise au jour depuis trois ans. De plus, les coquilles retrouvées ont une couleur rougeâtre, due à l’application volontaire d’ocre, et, elles présentent une légère usure au même endroit, preuves, selon les chercheurs, de leur utilisation comme pendentif.
La grotte des pigeons
Vue intérieure de la grotte des Pigeons

La grotte des Pigeons s’était déjà fait connaître, il y a quelques années, par la découverte de restes humains en contexte funéraire datés entre 12’000 et 11’000 avant notre ère. Si la datation bien plus ancienne des mollusques est confirmée, il ne restera plus à l’équipe d’archéologues, co-dirigée par le marocain Abdeljalil Bouzouggar et l’anglais Nick Barton, que de trouver les vestiges des porteurs de ces parures. La découverte de ces individus nous permettrait, le cas échéant, de compléter nos connaissances sur le groupe humain qui peuplait l’Afrique du Nord au début de l’émergence d’Homo sapiens. Nul doute alors que l’on entendrait à nouveau parler de la grotte des Pigeons.

Tomb raider en Cisjordanie

L’un des archétypes de l’archéologue est le chasseur de tombe, que les anglophones désignent de tomb raider. De là, le titre de la série qui met en scène l’archéologue virtuelle Lara Croft. On sait grâce à l’histoire qu’Hérode le Grand, fut institué roi de Judée par la volonté de la puissance romaine, entre 37 et 4 av. J.-C. En plus de nombreuses autres constructions, comme celle de Césarée et de Massada, il décida de faire construire une citadelle et un palais à l’emplacement de sa victoire sur la dynastie des Asmonéens, site qu’il baptisa de son propre nom : Hérodium. Il en fit également le lieu de sa sépulture. Voici maintenant trente-cinq ans que l’archéologue israélien Ehud Netzer et son équipe sont à la recherche du tombeau du roi bâtisseur. Le roi Hérode est bien connu par les écrits de Flavius Joseph sur La Guerre des Juifs et est cité à plusieurs reprises dans le Nouveau Testament. Le site d’Hérodium se trouve à douze kilomètres au sud de Jérusalem, en territoire palestinien. D’où l’importance symbolique, à bien des égards, de cette recherche.

Palais d'Hérodium

Le palais d’Hérode à Hérodium

Dans une conférence de presse tenue hier à l’université hébraïque de Jérusalem, l’archéologue a présenté l’aboutissement de ses longues années de fouilles. L’essentiel de la découverte se résume en un ensemble de fragments d’un grand sarcophage en calcaire ocre provenant de Jérusalem, et dont certains éléments sont pourvus de motifs décoratif en forme de rosettes. Mais, si de fait, l’emplacement d’Hérodium est incontestable il n’en va pas encore de même de la tombe d’Hérode. En effet, en l’absence d’une inscription ou d’une autre preuve tangible, rien ne permet de prouver que le site et les vestiges mis au jour par l’équipe israélienne sont bien ceux du tombeau et du sarcophage du roi Hérode. En attendant que de nouvelles découvertes aillent dans ce sens, il semble prudent d’attendre une confirmation. Mais après trente-cinq ans de recherche, la patience est éprouvée et il apparaît temps de trouver ce que l’on cherche depuis longtemps. Même si ce fut un peu long, pour Ehud Netzer, il n’est jamais trop tard pour entrer dans le cercle fermé des tomb raiders qui ont réussi.

Un gnomon de l’âge du Bronze ancien au Mont Bégo

Le site archéologique du Mont Bégo dans les Alpes Maritimes en France est depuis longtemps connu du monde archéologique pour conserver sur les surfaces rocheuses de la Vallée des Merveilles plus de 40’000 pétroglyphes. Parmi ceux-ci, un chercheur du Musée d’Anthropologie préhistorique de Monaco, Jérôme Magail, a isolé une série de 36 gravures qui, associée à l’ombre d’une arrête artificiellement taillée dans le roc, tel le style d’un cadran solaire, forment ensemble une sorte de gnomon. En effet, du 21 juin, date du solstice d’été, au 14 septembre, date de la désalpes des troupeaux, le sommet de l’ombre portée par l’arrête vient se poser en fin d’après-midi devant l’une ou l’autre des figures gravées, suivant la marche des jours, et selon un cycle immuable chaque année. Ce phénomène est présenté en animation sur le site dédié à cette recherche.

Mont Bégo

La roche au gnomon

Les pétroglyphes gravés au pied d’une roche lisse inclinée selon l’axe est-ouest représentent des poignards et des têtes de bovidés. La forme triangulaire des lames de poignards gravés attribuée à un type connu à l’âge du Bronze ancien suggère une datation aux alentours de l’an 2000 av. J.-C. Ce gnomon pourrait ainsi constituer l’un des plus anciens calendriers estivaux du monde. Après les dernières recherches autour de Stonehenge et des autres sites mégalithiques, et surtout après la découverte du disque de Nebra en Allemagne, une telle observation ne surprend guère, mais apporte aux spécialistes, une nouvelle grille d’interprétation pour donner un sens aux figures représentées.