Néfertiti reste à Berlin

Le buste polychrome de Néfertiti n’est pas prêt de rentrer en Egypte. Pour des raisons officielles de conservation, le ministre allemand de la culture, Bernd Neumann, refuse d’accéder à la demande du grand patron des antiquités égyptiennes, Zahi Hawass, de prêter pour trois mois, le temps d’une exposition, le célèbre buste en plâtre de l’épouse du non moins célèbre pharaon de la XVIIIe dynastie, Akhenaton. Cette oeuvre en plâtre de 48 cm de hauteur, a été découverte à Tell el-Amarna en 1912 par l’archéologue allemand Ludwig Borchardt dans les fouilles de l’atelier de l’artiste Thoutmès. Acquise légalement, semble-t-il, par l’Allemagne en 1913, elle constitue l’une des pièces maîtresses de la Museumsinsel de Berlin.

Néfertiti à Berlin

Le buste de Néfertiti exposé dans son nouvel écrin

On peut penser que Berlin craint, en cas d’acceptation, de ne pas pouvoir récupérer le portrait de la reine une fois l’exposition terminée, car Le Caire a maintes fois exprimé le désir du retour définitif du buste de la souveraine dans son pays, ainsi que celle de la pierre de Rosette, actuellement au British Museum, ou celui du plafond zodiacal du temple de Dendérah, au Louvre. En guise de rétorsion, l’Egypte menace, toujours par la voix de Zahi Hawass, de ne plus permettre dorénavant le prêt de pièces archéologiques égyptiennes à l’Allemagne, si la présente demande n’est pas satisfaite. Mais la menace n’effraye pas les milieux culturels allemands qui peuvent se passer des emprunts au patrimoine égyptien pour présenter des expositions intéressantes.

Sous le charme de Fiskardo

Il y a quelques années, ma famille et moi, en séjour sur l’île de Leucade, avions pris le ferry pour l’île d’Ithaque afin de passer une nuit dans la patrie d’Ulysse. Sur la route, à l’aller, comme au retour, une courte escale était prévue dans le petit port de Fiskardo au nord de l’île de Céphalonie. Séduit par le charme de sa rade, je m’étais dit qu’un jour j’aimerais bien m’y arrêter plus longtemps. C’est là, selon une dépêche du ministère grec de la culture datée du 4 avril, qu’une équipe d’archéologues grecs a mis au jour une tombe d’époque romaine en forme de petite maison enclose dans une chambre sépulcrale de 8,20 sur 5,80m. Ce genre d’aménagement mortuaire est très semblable à ce que l’on peut voir dans la nécropole de l’Isola Sacra près de Rome, entre Ostie et Fiumicino.

Tombe de Fiskardo

La tombe en forme d’habitation de Fiskardo

Faits remarquables, la tombe est intacte et la porte en pierre qui la ferme comporte encore deux verrous en état de fonctionner. A l’intérieur, deux urnes funéraires, l’une en verre, l’autre en céramique. Leur contenu a livré, entre autres, des boucles d’oreilles, des bagues et des fibules en or, des clés en cuivre ainsi que des pièces de monnaies. Non loin de là, sur la partie nord de la zone investiguée, a été mis en évidence un espace public qui a toutes les apparences d’un théâtre. Mais il faudrait, selon le ministère, poursuivre la fouille pour s’en assurer. Si tel est bien le cas, ce serait là le seul théâtre connu à ce jour de toutes les îles ioniennes. Ainsi, au prochain passage, j’aurais un motif de plus pour faire une halte dans le charmant petit port de Fiskardo.

Le mystère des Pyramides, révélé?

La dernière des sept merveilles du Monde à tenir debout, la grande pyramide de Khéops, continue, après 4500 années d’existence, à susciter l’admiration et à éveiller des questionnements sur son mode de construction. Il y a quelques semaines ce blog relayait l’hypothèse intéressante qu’elle puisse être constituée d’une sorte de béton. Le 30 mars dernier, l’architecte français Jean-Pierre Houdin, a présenté à la Géode de la Cité des Sciences de la Villette à Paris une autre façon dont elle aurait pu être bâtie en pierre de taille, malgré tout. L’élément clé de sa démonstration est que pour acheminer les pierres de taille dans la partie supérieure de l’ouvrage les ingénieurs experts de la troisième dynastie de l’Egypte ancienne auraient conçu une série de rampes courrant sous la surface du monument. Ainsi, la Grande Pyramide aurait été bâtie de l’intérieur. Cette habile méthode permet de résoudre le problème de l’énorme rampe extérieure qu’aurait nécessité la mise en place des blocs jusqu’au pyramidion, la pointe sommitale parachevant l’ouvrage, qui culmine à 146 mètres de hauteur. A l’aide d’un logiciel d’imagerie en 3D développé par l’entreprise Dassaults Systèmes, l’ensemble de cette théorie, fruit de huit années de recherche, a été modélisé de manière très séduisante, et est accessible à partir d’un site spécialement dédié à sa présentation: Khéops révélé.

Rampe intérieure

Acheminement d’un bloc par la rampe intérieure de la Grande Pyramide

La revue Sciences et Avenir de ce mois consacre du reste sa couverture et un dossier de seize pages à la présentation de cette nouvelle théorie. La démonstration est si détaillée et convaincante qu’il est difficile de la critiquer. Il faudrait pour cela obtenir des autorités égyptiennes, une fois de plus, le droit de vérifier sur le terrain la présence effective de ces rampes intérieures sous l’épiderme des quatre faces de la Grande Pyramide. En attendant de découvrir enfin, selon une autre hypothèse à vérifier, la quatrième chambre de la pyramide, celle où reposerait la dépouille du pharaon. Force est de constater que le mystère des Pyramides, tel que l’évoquait Jean-Philippe Lauer dans son célèbre ouvrage, n’est pas encore définitivement révélé.

Le vase de Mathay

Le village de Mathay, situé dans le département du Doubs en France, était connu jusqu’à présent, archéologiquement parlant, comme un faubourg de la ville romaine de Mandeure près de Montbéliard. Dorénavant elle sera également célèbre pour le trésor remarquable contenu dans un vase mis au jour lors d’une campagne de recherche effectuée sur le territoire de cette commune par trois prospecteurs affiliés à la Fédération nationale des utilisateurs de détecteurs de métaux (FNUDEM). Mais avant le trésor, ce qu’il y a surtout de remarquable dans cette découverte c’est qu’elle a été faite par des utilisateurs de détecteur à métaux qui ont immédiatement fait part de leur importante découverte aux autorités communales et archéologiques compétentes comme l’exige le nouveau code du patrimoine français. Le trésor, proprement dit, est constitué par un ensemble de plus de 1400 pièces de parures féminines de l’âge du Bronze final. La découverte telle que relatée dans Le Monde du 10 avril annonce la mise au jour de « plusieurs colliers faits de perles de verre, d’ambre et de feuilles d’or enroulées ; une série de bracelets différents en bronze ; une ceinture articulée constituée de maillons de bronze dotés de pendeloques ; des anneaux de cheville en bronze; des plaques de 10 cm de long recouvertes d’une feuille d’or, qui devaient être cousues sur un costume, et enfin une quantité étonnante de petits anneaux de bronze enfilés en série. Le dépôt contient aussi plusieurs sphères en tôle de bronze de quatre centimètres de diamètre revêtues d’une feuille d’or ». Grâce à cette découverte en ensemble clos et à l’assemblage des différents types représentés, on peut dater l’enfouissement des vestiges aux alentours de l’an 1000 avant J.-C.

Trésor de Mathay

Une partie du contenu du vase de Mathay (photo J.-F. Piningre)

Les conversations sur le forum des prospecteurs, nous apprennent qu’ils se félicitent d’avoir déclaré le trésor et de ce que, dans cette affaire, tout se soit bien passé avec la direction du Service régional d’archéologie de Franche-Comté. En outre on y découvre des photos du trésor lors de sa découverte et après l’extraction du vase dans un plâtre. La FNUDEM se targue d’avoir déjà déclaré une dizaine de trésor, plus de 2500 sites archéologiques inédits et des milliers d’artéfacts et de monnaies, dont certaines inédites. Grâce à l’exemple d’amateurs honnêtes comme Eric Rovert, l’inventeur du vase de Mathay, la collaboration entre les archéologues et les prospecteurs ne peut que s’en trouver renforcée.

Le Musée national suisse réorganisé

Collectionner, conserver, étudier et diffuser sont les activités que le Musée national suisse recevra comme mandat de la Confédération suisse, si le projet de loi sur les musées et les collections de la Confédération est accepté au terme de la procédure de consultation qui vient de s’ouvrir. Des quinze entités différentes qui composent l’actuel « Groupe Musée Suisse » seules quatre seront conservées pour former le futur Musée national suisse: l’actuel bâtiment central du Landesmuseum à Zurich, le château de Prangins, le Forum d’histoire suisse de Schwyz, et le Centre des collections à Affoltern-am-Albis.

Landesmuseum

L’ancien Landesmuseum s’apprête à faire peau neuve

Ce nouveau Musée national suisse sera un établissement de droit public doté de la personnalité juridique, réglant lui-même son organisation et sa comptabilité, selon la teneur de l’article 1 de la loi mise en consultation jusqu’au 9 juillet 2007. Il devra poursuivre trois objectifs : présenter l’histoire de la Suisse, étudier l’identité de la Suisse, et être un centre de compétences pour d’autres musées suisses. L’autonomie ainsi acquise nécessitera un changement de statut juridique du personnel. En effet, si les membres du Conseil du musée resteront des cadres de l’administration fédérale, en revanche, les collaboratrices et les collaborateurs (actuellement sous la tutelle de l’Office fédéral de la culture) seront réengagés sur la base d’un contrat de droit privé lorsque la nouvelle loi entrera en vigueur. A l’avenir, pour augmenter son budget, le Musée national suisse devrait exploiter au mieux son potentiel commercial et devrait également favoriser le mécénat.

L’archéologie en questions

Quels sont les lois et les concepts de base de l’archéologie préventive ? C’est pour répondre à cette interrogation fondamentale que le ministère français de la Culture vient de publier un guide de l’archéologie préventive et de la protection du patrimoine intitulé fort justement : l’archéologie en questions. Ce petit aide-mémoire, constitué de 40 questions et de leurs réponses, est avant tout destiné aux services des collectivités locales chargés de mettre en œuvre les règlementations en vigueur en France.

Fouilles à Nice

Intervention archéologique dans une rue de Nice

Pour les archéologues et les spécialistes engagés dans le domaine de l’archéologie, cette plaquette constitue un bon résumé de l’ensemble de leurs activités. Même si ce guide est destiné à l’usage de la France, ce n’est pas sans intérêt que l’on peut le consulter sur d’autres territoires, afin de se livrer à des comparaisons utiles des pratiques. En tous les cas, un tel vade-mecum devrait exister partout, car il serait bien, où que l’on se trouve, de rappeler les droits et les devoirs des uns et des autres, en particulier avant tous projets de construction nécessitant des fouilles, en cas de découverte fortuite de vestiges ou pour régler l’usage des détecteurs de métaux.

L’appel de Nouakchott

Au début du mois de février s’est tenu à Nouakchott, en Mauritanie, un colloque sur les perspectives de l’Archéologie préventive en Afrique de l’Ouest. Organisé par l’Institut mauritanien de recherches scientifiques (IMRS), et l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) en présence d’un représentant de l’Unesco, cette réunion ayant rassemblé plusieurs dizaines de chercheurs européens et africains s’est attachée à définir les moyens de mettre en place une véritable politique de protection du patrimoine archéologique africain. A l’issue de cette réunion, les participants ont lancé « l’appel de Nouakchott » pour que le patrimoine africain enfoui puisse bénéficier d’une charte de protection internationale, à l’instar de la convention de Malte qui règle en Europe les rapports entre l’archéologie préventive et l’aménagement du territoire.

Artefacts du Mali

Une partie des artéfacts maliens saisis par les douaniers français

S’il existe bien des lois nationales qui protègent le patrimoine des pays de l’ouest africain, il est souvent difficile de les faire appliquer, surtout dans des états en mal de développement lorsque des intérêts économiques prépondérants sont en jeu. Ainsi, c’est d’abord à la sensibilisation des grandes sociétés multinationales, du pétrole et des produits miniers, actives dans la région que l’appel est avant tout destiné, afin qu’elles n’oublient pas dans leurs entreprises régionales leur responsabilité vis-à-vis du patrimoine culturel. Mais il faut également que cet appel à l’aide soit entendu par les populations locales qui pour quelques devises sont prêtes à brader leurs vestiges archéologiques en pratiquant des fouilles clandestines de grande ampleur pour alimenter un trafic des antiquités en pleine expansion. Ainsi récemment, la douane française a appréhendé sur l’aéroport de Roissy un véritable trésor d’artéfacts préhistoriques provenant du Mali et destiné au marché étasunien. Il reste donc beaucoup à faire dans le domaine de la protection du patrimoine africain et souhaitons que le message de nos collègues soit entendu par toutes les parties en cause. Le 11 avril, l’émission de radio « le salon noir » de France Culture tâchera de donner un écho supplémentaire à cet appel.

L’archéologie filmée

Il y a différentes façons de présenter des résultats archéologiques au grand public. Comme nous le démontre chaque semaine la chaîne Arte, par l’entremise de son émissions du samedi soir, L’aventure humaine, l’une des plus efficaces, sinon des plus attrayantes, est certainement le film. Et c’est pour juger de cette efficacité que des festivals internationaux du film archéologique sont organisés un peu partout. En Suisse, à l’initiative de Christophe Goumand, c’est le Musée romain de Nyon qui présente, tous les deux ans, la plus grande manifestation du genre. Dès demain, le festival international de films d’archéologie vivra sa cinquième édition, et pour tous, sans restriction, son accès étant gratuit.

Les Pharaons noirs seront en vedettes mercredi soir

Durant cinq jours, du 20 au 24 mars, seront présentés, à l’Usine à gaz, une quarantaine de film, regroupés en huit séances, chacune consacrée à une période ou un thème particulier. A retenir en particulier la soirée de mercredi dédiée à l’archéologie du Soudan, avec la présence de Charles Bonnet, et une autre soirée, celle de jeudi, consacrée au pillage des sites archéologiques et au marché de l’art des antiquités. Le festival se terminera samedi soir par la remise des prix et la projection des films primés. Alors, pour une fois, pourquoi ne pas voir en primeur sur grand écran, l’un ou l’autre de ces films, avant qu’il ne passe à la télévision.

L’archéologie française manifeste

Demain, 14 mars, à 15h30, selon l’annonce d’un tract intersyndical, tous les archéologues français sont invités à Paris, au Palais-Royal, pour joindre leur voix aux manifestants provenant de divers départements du Ministère de la Culture. Ils seront accompagnés, en particulier, par les fonctionnaires de la Bibliothèque Nationale et les gardiens des grands musées. Ces derniers, pour appuyer leurs revendications ont même créé un blog. Ils demandent en premier lieu un relèvement général de leur salaire, compte tenu de l’augmentation des prix et de la pénibilité de leur travail auprès de la Joconde et d’autres chefs-d’œuvre très visités.

Colonne de Buren

Les colonnes de Buren, lieu de rassemblement de la manifestation

Pour leur part, les archéologues vont se plaindre de leur sous-effectif endémique dans de nombreuses régions face à l’ampleur des tâches à accomplir. La loi sur l’archéologie préventive, devait leur donner les moyens de le résorber. Las, la réduction des émoluments versés par les aménageurs, le plafonnement des effectifs, l’ouverture à la concurrence et les pressions exercées sur les cadres des services régionaux de l’archéologie pour qu’ils limitent leurs prescriptions de fouilles et laissent détruire de nombreux sites archéologiques, ont créés des conditions où la recherche archéologique n’y trouve pas sont compte. Cette manifestation des agents de la Culture pourrait déboucher, comme souvent en France, sur une grève. Gageons cependant, qu’une grève dans ce secteur à moins d’impact que celle des éboueurs.

Archéologue: un emploi atypique

Le gouvernement suisse vient de prendre acte d’un rapport qui analyse la sécurité sociale des acteurs culturels en Suisse. Sont considérés comme acteurs culturels les professions artistiques, du théâtre et des médias audiovisuels soit celles appartenant aux classes 82 et 813 de la nomenclature suisse des professions (NSP 2000) qui recense près de 18000 métiers. Dans cette nomenclature, les archéologues, se trouvent cantonnés dans la classe 852 des professions des sciences humaines en compagnie des historiens et des philologues. Quant aux techniciens de fouilles, ils n’y paraissent pas directement. Est-ce que les statisticiens les classent dans la catégorie des autres métiers des sciences humaines (classe 852.03) ou dans celle des autres techniciens (classe 321.09) à la suite de ceux issus du bâtiment et du génie civil et des chefs de chantier?

fouilleurs

Quel statut pour les archéologues?

Quoiqu’il en soit, et même si les personnes engagées dans le domaine de l’archéologie n’en font pas partie officiellement, la situation précaire des emplois décrite dans le rapport sur la sécurité sociale des acteurs culturels est très comparable à celle vécue actuellement par un grand nombre de personnes oeuvrant dans le milieu archéologique. Ainsi, la proportion des emplois à durée limitée est près de sept fois supérieure à la moyenne nationale et le taux de chômage y est jusqu’à trois fois plus élevé. Comme le signale le résumé de cette étude, l’emploi « normal », autrement dit l’engagement à plein temps de durée indéterminée, est progressivement supplanté par des formes de travail plus flexibles et moins traditionnelles qualifiées d’emplois atypiques. Le secteur culturel présente une part d’indépendants sous mandat, d’activités à temps partiel et à durée déterminée, ainsi que d’emplois multiples, c’est-à-dire exercés auprès de différents employeurs, qui se situe bien au-dessus de la moyenne suisse. En conclusion, les organisations culturelles devraient prioritairement et aussi vite que possible s’atteler à la création d’une institution de prévoyance pour tous les acteurs culturels car il en va de leur condition de vie à l’âge de la retraite. Si des améliorations de la sécurité sociale sont prises dans un proche avenir, il faudrait que les intermittents de l’archéologie puisse également en bénéficier au même titre que les intermittents du spectacle.