Category Archives: Musées, expositions

A l’aube de l’Europe

Au musée national d’histoire de Roumanie à Bucarest (MNIR) vient de s’ouvrir l’exposition « A l’aube de l’Europe, les grandes cultures néolithiques de Roumanie». Pour l’occasion sont présentées au public, parfois pour la première fois, 1200 pièces néolithiques provenant de 39 musées roumains. L’ouverture s’est faite en l’honneur de la visite dans ce pays de la Commission aux Affaires Etrangères du Parlement suisse. Ce n’est pas un hasard. En effet, c’est lors d’une visite en 2003 en Roumanie de l’association Hellas et Roma, groupe genevois de passionnés d’archéologie, que l’idée d’une telle exposition a germé. En outre, la direction générale de l’exposition a été confiée à l’archéologue suisse Laurent Chrzanovski.

Le Penseur et la Femme
Le « Penseur » et la « Femme assise » (photo : MNIR)

L’exposition permet d’évoquer tout un chapelet de civilisations aux noms évocateurs pour les néolithiciens comme Boian, Vinca, Cucuteni, Hamangia, Gumelnita, Vadastra, Bodrogkerestur, Cernavoda et de découvrir des chef-d’œuvres de l’art néolithique comme le «Penseur de Cernavoda » et « la femme assise » de la culture d’Hamangia datés de la seconde moitié du 6ème millénaire avant notre ère. Cependant, pas la peine de se précipiter en Roumanie pour découvrir l’exposition, car dès l’année prochaine elle entamera une tournée internationale. En juin 2008 elle s’ouvrira au public à Olten, en Suisse, dans le cadre de l’Historisches Museum. Puis ce sera au tour de Bruxelles de l’accueillir avant de la laisser poursuivre sa route en Europe, voire en Amérique.

Le crépuscule des Celtes

En Suisse, les manifestations liées au thème « Année des Celtes 2007» se poursuivent. Ainsi, jeudi dernier le Laténium à Hauterive a inauguré sa nouvelle exposition temporaire « Par Toutatis ! La religion des Celtes » adaptée d’une création du Musée gallo-romain de Lyon-Fourvière. Hier soir à Neuchâtel, Vencelas Kruta, lors d’une conférence publique, a répondu à sa manière à la question : qui sont les Celtes? Et, à partir d’aujourd’hui, quelques dizaines d’éminents spécialistes du Second Âge du Fer participent à une Table ronde internationale afin d’échanger leurs connaissances sur la période de La Tène.

CrÂne de La Tène

Prise de tête sur La Tène (photo:Musée Schwab)

Toujours à Neuchâtel,  l’évènement attendu par tous se produira ce soir. Il s’agit de la projection en avant-première du film de Stéfane Goël « Le Crépuscule des Celtes », coproduction de la société Climage, de la SSR et d’Arte. Partant de la découverte l’année dernière d’un important sanctuaire celte sur la colline du Mormont près d’Eclépens dans le canton de Vaud, entre Lausanne et Yverdon-les-Bains, les archéologues s’interrogent sur ce qu’ils ont observés, ici et ailleurs, sur la culture et les croyances des Celtes. Que savons-nous ou croyons-nous savoir sur ce peuple et sa civilisation dont la présence est attestée sur le territoire de vingt-deux pays européens. A la lumière des dernières fouilles de La Tène et du Mormont on constate qu’il nous reste encore beaucoup d’énigmes à résoudre.

Le blues de Mytilène

L’île de Lesbos fut la destination de mes dernières vacances familiales. Ce fut également le lieu de naissance de la poétesse Sapho et la dernière résidence connue de la tête d’Orphée. Malgré son riche passé, sur le terrain, peu de chose à voir facilement, si ce n’est le temple dédié à la triade Hera, Zeus et Dionysos à Messa, dont la restauration a bénéficié de subventions de la communauté européenne, mais pourvu d’une route d’accès qui n’est qu’un étroit chemin pierreux et poussiéreux. Toutefois, la ville de Mytilène dispose d’un musée d’archéologie formé de deux bâtiments (un ancien et un nouveau) qui abrite les plus belles découvertes effectuées sur l’île. Parmi elles, quelques belles mosaïques, dont l’une présente des scènes de théâtre antique ainsi que de nombreuses sculptures bien mises en valeur dans le nouveau bâtiment qui a reçu, par ailleurs, la distinction 2004 des musées de Grèce.

Musée archéologique de Mitylène

Interdiction de photographier dans ce musée

Cependant, pas moyen de rapporter un témoignage personnel des pièces intéressantes ou de la mise en scène muséographique car interdit de prendre la moindre photographie même sans flash sous prétexte que les pièces exposées ne sont pas encore publiées. Bien sûr, en tant qu’archéologue il suffirait, je l’espère, de s’approcher du conservateur ou mieux encore de son autorité de tutelle, de faire valoir ses titres et d’obtenir ainsi l’autorisation de photographier sous conditions. Mais je me mets dans la peau du visiteur lambda, et je ne trouve pas normal qu’il ne puisse pas emporter un souvenir photographique d’un patrimoine qui est la propriété de la collectivité tout entière et pas uniquement celle de la caste des conservateurs. L’interdiction de photographier, lorsqu’aucun problème de conservation ne la justifie, n’est pas à l’honneur des administrations des musées qui la maintiennent. Elle ne fait que créer une distance peu propice à l’attachement du public pour l’institution muséale qui en abuse. Et sans image, pas de mémoire, et le musée disparaîtra dans l’oubli de ses visiteurs d’un jour. En conclusion, comme pourrait le signaler le blog d’une spécialiste du web, on est, à Mytilène, encore loin du musée virtuel. Le blues du visiteur remplace le bleu de Mytilène.

La Rome des Césars à Vallon

Le Musée romain de Vallon, près d’Avenches, présente aujourd’hui et jusqu’au 13 avril 2008 la nouvelle exposition temporaire « La Rome des Césars » en collaboration avec le Service archéologique de l’Etat de Fribourg. Il s’agit en fait d’une première escale en Suisse de celle créée il y a deux ans au Musée de l’Arles et de la Provence antique, intitulée « De Rome à Arles ». Au cœur de l’exposition sont réunis une vingtaine de dessins originaux du dessinateur Gilles Chaillet, connu, entre autres, pour ses illustrations de deux tomes des voyages d’Alix (ou d’Orion) et surtout du volume « Dans la Rome des Césars » remarquable reconstitution visuelle de la ville éternelle en l’an 314 de notre ère, du temps de l’empereur Constantin.

Colisée selon Gilles Chaillet

Les alentours du Colisée (dessin: Gilles Chaillet)

Pour tous ceux qui aiment visiter Rome comme moi, avec le plan de la Forma Urbis Romae dans une main et le guide archéologique de Filippo Coarelli dans l’autre, les dessins de Gilles Chaillet apportent, si besoin, un complément visuel abouti, tant artistiquement que scientifiquement, et permettent de confronter plus facilement le passé au présent, comme autrefois les restitutions réalisées à partir de photographies par l’archéologue italiens Giuseppe Gatteschi. En attendant, si tous les chemins mènent à Rome, il y en a aussi qui conduisent à Vallon. En parallèle de cette présentation, l’exposition offre un regard sur l’Helvétie à partir de maquettes et d’aquarelles représentant quelques sites et monuments romains découverts en Suisse.

Machu Picchu vs Yale

L’année 2007 semble être une année faste pour les conservateurs de la citadelle inca du Machu Picchu au Pérou. Leur site a été élu le 07.07.07 parmi les sept nouvelles merveilles du monde et ils ont appris qu’à la suite de nombreuses années de tractations un accord de restitutions vient d’être conclu avec les Etats-Unis concernant près de 4000 pièces archéologiques que le découvreur du site Hiram Bingham et son équipe avaient mis au jour entre 1911 et 1916 et qui furent déposées dans l’université étasunienne de Yale.

Machu Picchu

En visite au Machu Picchu (photo: Flickr)

Surnommée la cité perdue des incas, le Machu Picchu avec ses 400?000 visiteurs annuels est le site touristique le plus visité du Pérou. Le retour dans leur pays des pièces enlevées par Hiram Bingham va induire la construction d’un nouveau musée qui pourrait ouvrir ses portes en 2010 et amener un nouveau flux de visiteurs. En attendant, et sans se déplacer il est possible de s’offrir une petite visite virtuelle du lieu avec un guide parlant français, anglais ou espagnol par l’entremise du site MachuPicchu360.com. Bonne visite !

Vikings remis au jour

Le musée des navires vikings d’Oslo est avec environ 450000 visiteurs par année l’institution muséale la plus visitée de Norvège. Il abrite en particulier deux navires, ayant servit de dernière sépulture à des vikings de haut rang. Le premier découvert en 1880 à Gokstad renfermait la dépouille d’un homme dont l’âge estimé est compris entre 50 et 60 ans et qui aurait été un petit roi ou un chef viking vers l’an 900. Le second, mis au jour en 1904, abritait le squelette de deux femmes inhumées en 834 dans un tertre, situé près de la ferme de Lille Oseberg à Slagen, Vestfold dans le sud-est de la Norvège. Les restes de l’homme furent ensevelis à nouveau en 1928 et ceux de deux femmes en 1948 à l’endroit de leurs découvertes respectives dans un cercueil en aluminium protégé par un sarcophage en pierre.

Oseberg

Remise au jour du cercueil d’Oseberg (photo: Peder Gjersoe)

Cette semaine, les archéologues norvégiens procèdent à leur ré-exhumation à des fins scientifiques. Lundi, le sarcophage qui renferme les deux dames a été extrait du sol, et, mardi matin, il a été ouvert pour constater que les deux squelettes sont dans un bon état de conservation bien que le sarcophage ait pris l’eau. Demain, jeudi, ce sera au tour du sarcophage de l’homme d’être retiré du sol, et, vendredi, les experts ouvriront le second cercueil dans l’enceinte du musée des navires vikings d’Oslo. Il sera procédé ensuite à des analyses d’ADN. Les archéologues cherchent en particulier à déterminer s’il existe un lien de parenté entre les deux femmes ensevelies, l’une étant bien plus âgée que l’autre. Certains experts pensent qu’il pourrait s’agir de la reine Åsa et de sa fille, d’autres penchent plutôt pour l’épouse d’un chef viking et sa servante. Dans tous les cas, la communauté archéologique ne peut que remercier ceux qui, il y a bientôt 60 et 80 ans, ont penser à protéger des vestiges de manière à permettre aujourd’hui des analyses qui n’avaient pu être envisagées à l’époque de leur ensevelissement.

Lucy dans West Side Story

Après avoir été l’égérie d’Yves Coppens pour la théorie de l’ East Side Story de l’aventure humaine, Lucy, ou plutôt les 52 fragments de squelette, qui résument les vestiges fossilisés d’un hominidé de l’espèce Australopithecus afarensis se sont envolés à la mi-août à bord d’un avion des Ethiopian Airlines pour se rendre à Houston, Texas, où ils constituent depuis vendredi 31 août 2007 l’élément central de l’exposition «Lucy’s Legacy : The Hidden Treasures of Ethiopia ». Jusqu’au 20 avril 2008 ses ossements demeureront exposés à Houston, puis, comme une grande vedette en tournée, Lucy partira pour faire son show durant 6 ans dans différents musées du Nouveau Monde pour y accomplir sa West Side Story.

Exposition Lucy

Lucy exposée à Houston, Texas (Photo: Houston Museum of natural science)

Mais est-ce bien raisonnable de déplacer ainsi des vestiges vieux de 3,2 millions d’années ? N’aurait-il pas été moins risqué d’exposer des copies des ossements plutôt que les originaux. C’est en tout cas ce que pense un grand nombre de paléoanthropologues consultés sur la question. Car depuis sa découverte en 1974 par l’International Afar Research Expedition, Lucy a été soigneusement conservée dans une chambre forte climatisée au Musée national d’Ethiopie et n’en a été sortie que pour des recherches scientifiques et seulement pour deux expositions publiques. Gageons que la présence des originaux au lieu des copies n’ajoute aucun intérêt à la valeur scientifique de cette exposition. Seule la valeur symbolique et sans doute également mercantile s’en trouvent notablement renforcées. Prénommée d’après la chanson des Beatles Lucy in the sky with diamonds, notre jeune Australopithèque s’est juste envolée d’Ethiopie pour faire recette.

De Trèves à Constantinople

Dans la ville de Trèves (Trier), dans l’ouest de l’Allemagne, une importante exposition « Constantin le Grand » rassemble jusqu’au 4 novembre 2007 quelque 1400 pièces issues de 160 collections dont celles du Louvre, du British Museum, du Prado et des musées de Rome. Partagée entre les salles de trois musées de la ville différents thèmes, liés au premier empereur romain converti au christianisme, sont abordés. Celui de l’Empire romain sous Constantin est présenté au Rheinisches Landesmuseum, les rapports de l’empereur au christianisme sont évoqués dans le Bischöfliches Dom- und Diözesanmuseum, enfin, le Stadtmuseum Simeonstift traite de l’influence du souverain en Europe. L’ensemble des lieux d’exposition couvre une surface de 3000m2. Cette vaste exposition représente la contribution officielle du Land de Rhénanie-Palatinat aux manifestations centrées autour de Luxembourg capitale européenne de la culture 2007.

Anamorphose de la statue de Constantin (Photo: Asisi)
Trèves fut la première résidence de Constantin avant qu’il ne s’installe à Rome puis à Constantinople (l’actuelle Istanbul) qu’il proclama en 330 nouvelle capitale de l’Empire. Le clou de l’exposition est à voir au Rheinisches Landesmuseum. Il s’agit d’une anamorphose de la statue colossale de l’empereur (12 mètres de haut à l’origine) placée autrefois dans la basilique de Maxence dont il ne reste plus qu’une tête et un pied conservés aux Musées du Capitole à Rome. Une copie de la tête, haute de trois mètres, a été confectionnée spécialement pour l’événement grâce à un complexe procédé de numérisation par ordinateur. Après l’exposition, la tête ira rejoindre son modèle dans la ville éternelle. Elle pourrait en effet remplacer l’original, en place depuis le XVIIe siècle dans une cour exposée aux pigeons et aux intempéries.

Des Celtes sur le Vully

Si les Romains se donnent rendez-vous ce week-end dans les vestiges de la colonie romaine d’Augusta Raurica (Augst, Bâle Campagne) pour le traditionnel Römerfest, les Helvètes se réuniront le week-end prochain sur l’oppidum celtique du Mont Vully, entre les lacs de Morat et de Neuchâtel, pour la première fête Vully Celtic. Organisée pour célébrer les trente ans de l’association Pro Vistiliaco, fondée en 1977 par l’ancienne archéologue cantonale Hanni Schwab (1922-2003), la manifestation proposera de nombreuses animations, dont des groupes de musique celtique et une quarantaine de stands. Il y aura bien sûr à manger et à boire, du sanglier rôti et de la cervoise artisanale.

Guerriers Celtes
Guerriers celtes en position de combat

En cette année 2007, déclarée année des Celtes, Vully Celtic fera aussi découvrir les techniques de guerre de ce peuple grâce à des reconstitutions de combats, en groupe ou en duels. Quelque 80 guerriers établiront leur campement et livreront bataille sur le site de la manifestation ainsi qu’au pied du «rempart des Helvètes», reconstitution d’un tronçon de murus gallicus. En attendant, préparé vous à l’évènement dès lundi 27 août en écoutant durant la semaine à venir l’émission de La Première, « Les dicodeurs » dont l’invité sera Thierry Luginbühl, professeur d’archéologie gallo-romaine à l’Université de Lausanne et chef de horde parmi les guerriers Helvètes.

Pétition pour les stèles de Sion

S’il existe un complexe mégalithique de référence en Suisse c’est bien celui des monuments et des stèles anthropomorphes du site du Petit-Chasseur à Sion. Ces dernières se présentent sous la forme de dalles de schiste plus ou moins soigneusement taillées et gravées en forme de figures d’ancêtres. Depuis 1976, les plus remarquables d’entre-elles ont trouvé place dans un cadre spécialement adapté à leur présentation au grand public, celui de la Grange-à-l’Evêque transformée dès lors en Musée d’archéologie reconnu loin à la ronde. Pour se convaincre, si besoin était, de l’importance exceptionnelle de ce témoignage pour notre héritage culturel, il suffit de lire la synthèse du professeur Alain Gallay sur les sociétés mégalithiques dans la collection «Le Savoir Suisse». Pourtant, trente ans plus tard, dans le cadre de la future restructuration des six musées cantonaux du Valais la fermeture de cet espace d’exposition est très sérieusement envisagée.

Les stèles du Petit-Chasseur

Exposition actuelle des stèles du Petit-Chasseur (photo: AVA)

Or, comme le dit l’adage : «loin des yeux, loin du cœur». L’association valaisanne d’Archéologie (AVA) craint que ce magnifique héritage ne puisse tomber dans l’oubli au terme de la restructuration en préparation. En effet, dans le projet du futur Musée d’histoire culturelle du Valais, une seule des 29 stèles et un tiers seulement des pièces archéologiques actuellement exposées devraient y trouver leur place. Pour éviter cela, elle a lancé il y a quelques mois une pétition « pour une présentation des collections archéologiques valaisannes en accord avec leur valeur patrimoniale ». La pétition, que l’on peut également soutenir en ligne depuis quelques jours, demande qu’une étude sérieuse sur la présentation permanente des collections d’archéologie du Valais soit réalisée et que les stèles soient maintenues à leur place actuelle tant qu’un projet de remplacement acceptable n’est pas réalisé. D’ici le 31 octobre 2007 l’AVA souhaite réunir assez de signatures venues du monde entier pour infléchir le cœur, que l’on ne souhaite pas de pierre, des autorités cantonales.