Category Archives: Découverte

Sous le charme de Fiskardo

Il y a quelques années, ma famille et moi, en séjour sur l’île de Leucade, avions pris le ferry pour l’île d’Ithaque afin de passer une nuit dans la patrie d’Ulysse. Sur la route, à l’aller, comme au retour, une courte escale était prévue dans le petit port de Fiskardo au nord de l’île de Céphalonie. Séduit par le charme de sa rade, je m’étais dit qu’un jour j’aimerais bien m’y arrêter plus longtemps. C’est là, selon une dépêche du ministère grec de la culture datée du 4 avril, qu’une équipe d’archéologues grecs a mis au jour une tombe d’époque romaine en forme de petite maison enclose dans une chambre sépulcrale de 8,20 sur 5,80m. Ce genre d’aménagement mortuaire est très semblable à ce que l’on peut voir dans la nécropole de l’Isola Sacra près de Rome, entre Ostie et Fiumicino.

Tombe de Fiskardo

La tombe en forme d’habitation de Fiskardo

Faits remarquables, la tombe est intacte et la porte en pierre qui la ferme comporte encore deux verrous en état de fonctionner. A l’intérieur, deux urnes funéraires, l’une en verre, l’autre en céramique. Leur contenu a livré, entre autres, des boucles d’oreilles, des bagues et des fibules en or, des clés en cuivre ainsi que des pièces de monnaies. Non loin de là, sur la partie nord de la zone investiguée, a été mis en évidence un espace public qui a toutes les apparences d’un théâtre. Mais il faudrait, selon le ministère, poursuivre la fouille pour s’en assurer. Si tel est bien le cas, ce serait là le seul théâtre connu à ce jour de toutes les îles ioniennes. Ainsi, au prochain passage, j’aurais un motif de plus pour faire une halte dans le charmant petit port de Fiskardo.

Le vase de Mathay

Le village de Mathay, situé dans le département du Doubs en France, était connu jusqu’à présent, archéologiquement parlant, comme un faubourg de la ville romaine de Mandeure près de Montbéliard. Dorénavant elle sera également célèbre pour le trésor remarquable contenu dans un vase mis au jour lors d’une campagne de recherche effectuée sur le territoire de cette commune par trois prospecteurs affiliés à la Fédération nationale des utilisateurs de détecteurs de métaux (FNUDEM). Mais avant le trésor, ce qu’il y a surtout de remarquable dans cette découverte c’est qu’elle a été faite par des utilisateurs de détecteur à métaux qui ont immédiatement fait part de leur importante découverte aux autorités communales et archéologiques compétentes comme l’exige le nouveau code du patrimoine français. Le trésor, proprement dit, est constitué par un ensemble de plus de 1400 pièces de parures féminines de l’âge du Bronze final. La découverte telle que relatée dans Le Monde du 10 avril annonce la mise au jour de « plusieurs colliers faits de perles de verre, d’ambre et de feuilles d’or enroulées ; une série de bracelets différents en bronze ; une ceinture articulée constituée de maillons de bronze dotés de pendeloques ; des anneaux de cheville en bronze; des plaques de 10 cm de long recouvertes d’une feuille d’or, qui devaient être cousues sur un costume, et enfin une quantité étonnante de petits anneaux de bronze enfilés en série. Le dépôt contient aussi plusieurs sphères en tôle de bronze de quatre centimètres de diamètre revêtues d’une feuille d’or ». Grâce à cette découverte en ensemble clos et à l’assemblage des différents types représentés, on peut dater l’enfouissement des vestiges aux alentours de l’an 1000 avant J.-C.

Trésor de Mathay

Une partie du contenu du vase de Mathay (photo J.-F. Piningre)

Les conversations sur le forum des prospecteurs, nous apprennent qu’ils se félicitent d’avoir déclaré le trésor et de ce que, dans cette affaire, tout se soit bien passé avec la direction du Service régional d’archéologie de Franche-Comté. En outre on y découvre des photos du trésor lors de sa découverte et après l’extraction du vase dans un plâtre. La FNUDEM se targue d’avoir déjà déclaré une dizaine de trésor, plus de 2500 sites archéologiques inédits et des milliers d’artéfacts et de monnaies, dont certaines inédites. Grâce à l’exemple d’amateurs honnêtes comme Eric Rovert, l’inventeur du vase de Mathay, la collaboration entre les archéologues et les prospecteurs ne peut que s’en trouver renforcée.

La tombe perdue de Jésus

Après la mise au jour, il y a peu de temps, du tombeau de l’apôtre Paul, c’est au tour de celui de notre Seigneur, Jésus Christ, de faire l’objet d’une telle annonce. C’est en tout cas à cette conclusion « sensationnelle » qu’un documentaire signé James Cameron et Simcha Jacobovici, intitulé The lost tomb of Jesus, aboutira ce soir sur la chaîne de télévision Discovery Channel.

Tombe de Jésus

L’entrée de la tombe de Jésus, fils de Joseph

En fait, cette découverte n’est pas vraiment inédite, puisque cela fait déjà 27 ans qu’un ossuaire d’argile portant l’inscription Jésus, fils de Joseph a été découvert à Jérusalem dans une sépulture du quartier de Talpiot en association avec d’autres ossuaires portant les noms évocateurs de Joseph, Marie, Matthieu ou de Judas fils de Jésus. Mais ces prénoms hébreux sont d’un usage fréquent au 1er siècle de notre ère, comme au Moyen-Age on s’appelait fréquemment Pierre, Paul ou Jacques. Ainsi on connaît plus de cent ossuaires au nom de Joseph et au moins sept portant le nom de Jésus, dont un, découvert au début du 20ème siècle qui portait également l’inscription : Jésus, fils de Joseph. Il y a donc l’embarras du choix. De plus, l’information elle-même a déjà été commentée en 1996 dans différents journaux et a même fait l’objet à l’époque d’un documentaire par la BBC. Aussi Cameron et Jacobovici ne font que remettre dans l’actualité une découverte ancienne sans y apporter, semble t-il, de réponses nouvelles. Cependant, le grand public déjà sensibilisé à la question grâce au Da Vinci Code de Dan Brown ne demande qu’à se laisser convaincre, et ce ne sont pas les réserves des spécialistes qui y changeront quelque chose.

Flamme éternelle

A une semaine de la Saint-Valentin, l’archéologue italienne Elena Menotti, directrice de la cellule d’intervention archéologique de Mantoue, ne pouvait faire de découverte moins emblématique que celle d’un couple de squelettes apparemment tendrement enlacé. La tombe, qui fait partie d’une nécropole, a été mise au jour lundi sur le chantier de construction d’une usine à San-Giorgio dans la banlieue de Mantoue. D’après l’outillage en silex récolté sur place, le site serait daté du Néolithique, entre 4000 et 3000 avant J.-C. Comme Mantoue se trouve assez près de Vérone, il n’en faut pas plus pour que la presse internationale n’évoque la mémoire des amours contrariées de Roméo et Juliette, et de leur dernier baiser.

Love story

Une histoire d’amour préhistorique?

Ce double enterrement d’un homme et d’une femme n’est cependant pas unique. Une des tombes de la Grotte des Enfants de Grimaldi, en Italie, actuellement exposée au Musée d’anthropologie préhistorique de Monaco et datant du Paléolithique supérieur présente dans une attitude assez proche un jeune garçon, d’environ quinze ans avec une femme plus âgée. Hyppolite et Phèdre ?

Révélations sur les bâtisseurs de Stonehenge

Il y a de cela quelques années, on a retrouvé le village des ouvriers œuvrant à l’édification des pyramides du plateau de Gizeh. En septembre 2006, à l’emplacement de Durrington Walls, a été mis au jour un site d’habitat contemporain de la phase initiale de construction de Stonehenge, soit vers 2600 av. J.-C. Cette découverte résulte des fouilles menées dans le cadre du Stonehenge Riverside Project, une vaste étude de l’ensemble de la zone entourant le célèbre cercle de pierres mégalithiques, dans laquelle sont impliquées six universités britanniques. A l’instar de ce qui s’est passé pour la connaissance de la civilisation égyptienne et des pyramides de Gizeh, cette découverte effectuée aux alentours de Stonehenge devrait nous faire connaître davantage la population et la société à l’origine de ce haut lieu de la préhistoire européenne.

Durrington Walls

Champ de fouille d’une habitation de Durrington Walls

Le gisement découvert est situé à 2,8 km de Stonehenge, et se trouve lui-même enclos dans une vaste enceinte circulaire. Les fouilles ont permis de dégager huit habitations, d’une surface au sol de 23m2. Si l’ensemble de la surface enclose est bâti, cela pourrait constituer le plus grand village néolithique de Grande-Bretagne, selon Mike Parker Pearson, responsable principal du Stonehenge Riverside Project. D’autres découvertes importantes ont été réalisées ces derniers mois dans les environs. Pour en savoir plus, des photos et des vidéos sont accessibles sur le site Internet de la National Geographic Society, qui finance une partie des travaux.

L’énigme de Kéros

Tous les amateurs d’art connaissent l’esthétique dépouillée des idoles provenant de l’archipel des Cyclades en mer Egée, témoins d’une culture originale qui s’est épanouie à l’âge du Bronze Ancien entre 3200 et 2000 av. J-C. Cette notoriété a un prix, et pas seulement dans les ventes aux enchères, mais également d’un point de vue archéologique. En effet, sur quelques 1400 pièces répertoriées, seuls pour 40% d’entre elles le contexte de découverte est connu. Or, la moitié de celles dont on connaît l’origine exacte provient énigmatiquement de la petite île de Kéros, actuellement quasi déserte. C’est pour en savoir plus sur ces statuettes de marbre au visage plat dont les plus célèbres, Le joueur de flûte et Le harpiste furent justement trouvés sur cette île, qu’une équipe gréco-britannique conduite par Colin Renfrew a investi les lieux le printemps dernier et a entrepris des fouilles en divers endroits.

Les fouilles du site de Kavos sur l’île de Kéros

Sur le site de Kavos, une cache ayant échappé aux fouilleurs clandestins a été découverte. Elle a livré de nombreux fragments d’idoles, délibérément brisées, dont le marbre provient de Naxos, Amorgos ou Syros. Le nombre peu élevé de remontages entre les morceaux constitue la preuve de cette fragmentation volontaire et suggère également que les statuettes furent détruites ailleurs avant leur enfouissement final. Colin Renfrew avance l’idée que Kéros a pu servir de centre cérémonial des Cyclades, quelques 1500 ans avant que l’île de Délos ne la remplace dans ce rôle. Une nouvelle campagne de fouilles durant les mois de mai et de juin de cette année est d’ores et déjà programmée et amènera, peut-être, de nouvelles connaissances sur la fonction exacte de ces figurines et sur l’énigme de Kéros.

Un astéroïde frappeur au temps des pyramides

La revue Ciel & Espace a mis ce mois-ci en couverture un titre choc: « Découverte d’une chercheuse française : un astéroïde a percuté la Terre à l’époque des pyramides ». La chercheuse en question s’appelle Marie-Agnès Courty. Elle est géomorphologue du CNRS au Centre européen des recherches préhistorique de Tautavel, et depuis quinze ans elle traque systématiquement les traces d’une curieuse strate géologique baptisée le « 4000 », vestige, selon-elle, de la collision de la Terre avec un astéroïde ou une comète de 1km de diamètre il y de cela 4000 ans. Cette datation entre en résonance avec la célèbre phrase du général Bonaparte avant la bataille des Pyramides : « Soldats, songez que du haut de ces monuments, 40 siècles vous contemplent », d’où, sans doute, la relation suggérée dans le titre du magazine. Remarquons cependant que les Pyramides du Plateau de Gizeh sont au mois cinq siècles plus âgées puisqu’elles sont datées actuellement entre 2620 et 2500 av. J-C. Mais le « 4000 », lui-même, apparaît également plus agé, puisqu’il date en fait de 2350 av. J.-C, selon le résumé d’une communication de Marie-Agnès Courty présentée lors d’un colloque en 1997 sur les catastrophes naturelles durant les civilisations de l’âge du Bronze.

Les îles Kerguelen

Les îles Kerguelen dans Google Earth


Selon une enquête minutieusement menée, l’impact se serait produit dans l’Océan austral, près des îles Kerguelen. Des quantités énormes de fragments de croûte océanique auraient été pulvérisées et projetées à des milliers de kilomètres de là au Proche-Orient, soit jusque sur le site d’Abu Hagheira en Syrie où Marie-Agnès Courty les a mis au jour pour la première fois en 1990. L’argument le plus convainquant en faveur de son hypothèse c’est la présence dans un sol soufflé et poudreux, recouvert d’argile et de sable, de micro-organismes marins, plus ou moins fondus, originaires des latitudes australes. De plus, d’autres lieux situés en Amérique du Sud, en Europe ou en Asie centrale semblent également livrer des éléments de ce même horizon. Reste cependant à expliquer, d’après certains géologues, pourquoi les échantillons analysés ne contiennent pas d’iridium ni de spinelles nickélifères, traceurs habituels des impacts météoritiques, et pour les archéologues, pourquoi aucun récit ne fait clairement état d’un évènement dont l’ampleur aurait dû laisser des témoignages écrits parmi les premières grandes civilisations de l’histoire.

Le hasard fait bien les choses

L’adage en titre est bien connu dans la profession. Quand on fait de l’archéologie il faut souvent accepter le fait que l’on ne trouve pas toujours ce que l’on recherche, ou, variante du même thème, que ce n’est pas celui qui cherche, qui trouve. C’est cette expérience cocasse qu’a fait en octobre 2005 l’archéologue canadien Yves Chrétien. En sondant les terrains préalablement à la construction de la promenade de Champlain près de la ville de Québec, il a découvert ce que depuis cinquante ans d’autres archéologues ont cherché en vain avant lui : le fort édifié en 1541 par les explorateurs Jacques Cartier et Jean-François Roberval, qui représente la première tentative d’implantation d’une colonie française en Amérique. L’emplacement, le sommet du promontoire de Cap-Rouge était connu depuis longtemps, mais les devanciers d’Yves Chrétien le cherchaient au nord du promontoire, alors qu’il fut fortuitement découvert au sud. Des fouilles de grande ampleur sont d’ores et déjà prévues cette année.

astrolabe de Champlain

L’astrolabe de Champlain et la rivière des Outaouais

Cette découverte canadienne en rappelle une autre, celle de l’astrolabe de Samuel de Champlain. Ce dernier fut, en 1608, le vrai fondateur de la ville de Québec, et c’est en son honneur, en prévision des célébrations du 400ème anniversaire de la ville en 2008, que l’on a donné son nom à ladite promenade ci-dessus. L’astrolabe fut semble-t-il perdu par le navigateur en mai 1613 alors qu’il remontait la rivière des Outaouais. En 1867, soit 254 ans plus tard, ce bel objet fut découvert fortuitement par un garçon de ferme. Passant ensuite entre les mains de divers propriétaires, il fut acquis en 1989 par le Ministère canadien des communications afin d’être exposé dans le remarquable Musée canadien des civilisations, un modèle du genre soit dit en passant.
Morale de ces petites histoires : on peut toujours chercher une aiguille dans une botte de foin, mais pour la trouver sans effort, attendons de sentir sa piqûre.

Archéologie aux Kerguelen

L’archéologie ce n’est pas seulement « la science des choses anciennes » mais c’est avant tout une technique d’observation du monde matériel, que la police scientifique, à travers l’approche forensique, nous a emprunté. Aussi, peut-on faire de l’archéologie même en l’absence de vestiges millénaires. Pour s’en convaincre il suffit de suivre l’équipe de Jean-François Le Mouël, chef du service du Patrimoine historique et des Sites archéologiques des TAAF (Terres australes et antarctiques françaises), qui a entrepris une mission de quatre mois sur les îles Kergelen, posées au sud de l’océan indien près de l’Antarctique. La base de fouille principale est située dans la Baie de l’Observatoire, qui doit son nom à une base établie là en 1874 par une expédition d’astronomes anglais qui s’étaient déplacés aussi loin pour observer le transit de la planète Vénus devant le Soleil, phénomène particulièrement rare puisque après un autre passage de ce corps céleste en 1882, le suivant ne s’est produit que 122 ans plus tard, le 8 juin 2004.

Une partie du site archéologique vue du ciel (note ArchaeObs du 24.12.06)

Jour après jour, et quelque soit la tournure du vent, la mission archéologique internationale aux îles Kerguelen, nous livre son journal de fouille, par l’entremise d’un site Internet, ArchaeObs, rédigé en trois langues : français, anglais et allemand. Ce louable effort de communication plurilingue est a relever. Il est par ailleurs divertissant de suivre quotidiennement l’avancement du travail des fouilleurs et de pouvoir ainsi partager à distance l’évolution de leurs méthodes de travail et de leurs résultats. L’essentiel des vestiges date du 19ème siècle et permet de se représenter à travers les artefacts mis au jour la vie quotidienne d’une expédition scientifique à cette époque. Il sera dès lors très instructif pour les chercheurs de confronter les données récoltées sur le site à celles que donneront les documents historiques de l’expédition astronomique tels qu’ils se trouvent dans les archives officielles.

De nouvelles pierres à Jelling

Jelling, petite ville du Jutland au Danemark, est connue pour ses deux imposants tumuli, son église et ses deux pierres runiques, formant un ensemble inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco. La pierre la plus ancienne a été érigée vers 950 après J.-C. par le chef viking Gorm le Vieux, premier roi du Danemark, en l’honneur de son épouse Thyra. La seconde, la plus grande, a été dressée par son fils, Harald-Dent-Bleue en l’an 983, à la mémoire de ses parents et de sa conversion au christianisme entrainant celle du Danemark et de la Norvège.

Les deux pierres runiques de Jelling et le tumulus sud

Cette année une équipe de fouille du Musée de Vejle, a ouvert une partie du terrain autour des tumuli et de l’église pour mettre au jour sept nouvelles pierres, qui pourraient faire partie d’une structure préhistorique. Les archéologues espèrent que l’une d’entre elles au moins soit couverte de runes sur sa face cachée. Dans tous les cas, pierre runique ou pas, ils pensent que cette découverte permettra d’apporter un nouvel éclairage sur le site, dont bien des éléments demeurent obscurs et sont l’objet d’hypothèses à démontrer.